LE QUOTIDIEN DU PHARMACIEN.- Quel bilan tirez-vous de ce XIXe congrès ?
LUCIEN BENNATAN.- Sérénité et impatience sont les deux maîtres mots qui me viennent d’emblée à l’esprit. Je retiendrai en outre de ce congrès un sentiment de solidarité et de proximité chez les pharmaciens PHR. Je ne sais pas si toutes les critiques dont notre groupement a été l’objet y ont contribué mais, à l’aube de notre vingtième anniversaire, les adhérents me sont apparus matures et très solidaires face aux difficultés économiques que rencontre aujourd’hui la profession. Ils semblent avoir conscience de la nécessité de poursuivre dans la voie du changement pour contribuer à faire du pharmacien un véritable acteur de santé et un réel producteur de services. Conscients que le système actuel est à bout de souffle et qu’il faut mettre en place un nouveau modèle, les adhérents PHR m’ont semblé en phase avec notre volonté de faire bouger les lignes et de contribuer à faire évoluer le système actuel vers un modèle inspiré à la fois du modèle français et du modèle anglo-saxon.
Les complémentaires peuvent-elles jouer un rôle plus important qu’actuellement ?
Bien évidemment ! La part du régime obligatoire va inéluctablement continuer à décroître. D’autant que l’éducation thérapeutique et le disease management vont faire leur apparition dans l’exercice de la médecine et donc de la pharmacie. Dès lors, les complémentaires ne pourront que prendre de plus en plus d’importance dans le système. Et pas seulement pour les pathologies bénignes ! D’ici à dix ans, un certain nombre de pathologies lourdes seront concernées par cette évolution. La réforme programmée des affections longue durée (ALD) en est d’ailleurs un des prémices. Dans cette perspective, PHR a d’ores et déjà lié langue avec les trois grandes familles de complémentaires - institutions de prévoyance, mutuelles et société d’assurance – qui ont toutes besoin de changer de modèle économique et de faire évoluer leur métier actuel de gestionnaire de flux financiers, vers un rôle d’assureur. Les organismes de prévoyance ne sont pas sur le premier recours et ont besoin de conquérir des parts de marché. Les pharmaciens pourront les y aider, à partir du moment où le cadre juridique idoine aura été trouvé. Car il est essentiel que ces contrats n’entravent pas l’indépendance des officinaux, tant du point de vue des achats que de la relation patient. Dans cette optique, nous travaillons avec Malakoff-Médéric et avons bon espoir de trouver un accord d’ici à la fin de cette année. Nous sommes également en contact avec un organisme mutualiste, déjà impliqué dans la prise en charge des médicaments et des pathologies, et qui table sur les services pour se différencier. D’ici à la fin du premier trimestre 2011, nous devrions mettre en place une expérimentation d’un an dans le département de la Loire. Nous travaillons enfin avec des sociétés d’assurance à un contrat qui permettrait aux patients d’être le client de l’acheteur de soins et aux pharmaciens de conserver la main sur les relations avec les industriels.
Quels sont les autres projets de PHR ?
Outre l’embauche d’un acheteur issu de la grande distribution, pour améliorer les capacités de notre centrale, nous allons lancer une gamme OTC à notre marque de distribution avec l’objectif de tendre vers les 25 % de croissance. La mise au point d’une carte de fidélité avec une borne interactive devrait également contribuer au développement des officines PHR. Par ailleurs, afin de permettre à nos adhérents de disposer de la taille critique nécessaire, nous allons transformer la SA coopérative en société immobilière dédiée à l’acquisition d’emplacements qui permettront aux pharmaciens PHR de se regrouper et de transférer leur officine. Nous allons également étendre le concept initié avec les diététiciennes pour développer le dépistage, l’autodiagnostic et ainsi aider les patients/clients à mesurer les facteurs de risque. Des infirmières seront ainsi embauchées par le groupement d’employeurs « Team Pharma », dont chaque adhérent PHR peut devenir actionnaire. En cas de traitement, ces infirmières interviendront également sur la gestion de l’observance. Le pharmacien prendrait ainsi une place centrale dans le parcours de soins du patient avec la mise en place de plans d’« objectifs santé » à court, moyen et long terme. Dans cette perspective, nous avons d’ores et déjà lié langue avec différentes agences régionales de santé (ARS), en particulier dans la région Nord, en Ile-de-France et dans les Pays-de-la-Loire.