Pendant longtemps, la bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO) a été largement attribuée au tabagisme et à la pollution dans les pays en voie de développement, des facteurs de susceptibilité d’origine génétique étant avancés pour expliquer les différences observées entre individus.
Depuis quelques années, ce concept classique a été battu en brèche, notamment par les travaux de Lange et al. en 2015 qui ont distingué, après plusieurs années de suivi, deux groupes de sujets souffrant de BPCO. Un premier groupe qui répondait à la trajectoire traditionnelle, chez lesquels le déclin de la fonction respiratoire ne débutait qu’à l’âge adulte et suivait une pente plutôt raide. Le second, qui concernait à peu près la moitié des patients, chez lesquels le volume expiratoire forcé en une seconde (FEV1) était déjà altérée au début de l’âge adulte, et le déclin de la fonction respiratoire par la suite plus progressif et modéré. Ce constat a donc suggéré l’existence d’événements déterminants le risque ultérieur de BPCO, au cours l’enfance, voire de la vie in utero.
Deux groupes de patients
Les travaux menés à partir de la cohorte de la TCRS (Tucson children’s respiratory study) distinguent eux aussi deux groupes de sujets en fonction des mesures de la FEV1 et du ratio FEV1/FVC (rapport de Tiffeneau) réalisées de l’âge de 13 ans à la quatrième décennie de la vie.
Trois grands facteurs de risque de fonction respiratoire basse persistante au cours de la vie ont été mis en évidence : capacité résiduelle basse à l’âge de 6 ans, asthme maternel et infections respiratoires basses dues au virus respiratoire syncytial (VRS) dans les premières années de la vie.
Une autre étude menée en Tasmanie chez des adultes suivis jusqu’à l’âge de 53 ans a différencié six groupes de sujets, dont l’un était constitué de ceux dont la fonction respiratoire était déjà basse au début de l’âge adulte et qui sont devenus fumeurs. Dans ce groupe, le déclin de la fonction respiratoire a été rapide et à l’âge de 53 ans, 46 % avaient une BPCO.
Un travail mené au Royaume-Uni et en Australie a distingué 4 types de trajectoires pulmonaires en suivant des individus de la petite enfance à l'âge de 24 ans. Les auteurs ont ensuite tenté de créer un score allélique, mais les résultats ont été décevants.
Le VRS, marqueur ou facteur causal ?
Quoi qu’il en soit, toutes ces études suggèrent qu’une prévention de la BPCO pourrait être possible en s’attaquant aux facteurs de risque précoce de déclin de la fonction respiratoire. Notamment, les interactions entre infections respiratoires basses à VRS dans la petite enfance et tabagisme ultérieur constituent une voie de recherche intéressante. Ces infections pourraient laisser leurs empreintes sur les voies aériennes, qui deviendraient plus susceptibles aux effets délétères du tabagisme à l’âge adulte. Autre hypothèse : les infections à VRS pourraient être le marqueur d’un certain type de réponse immune, qui prédisposerait à la fois aux infections à VRS et à une plus grande susceptibilité au tabagisme.
L’équipe de Tucson, en Arizona, poursuit ses recherches en analysant les expressions géniques au sein des prélèvements d’expectoration induite chez des fumeurs de la cohorte TCRS, avec ou sans antécédents d’infections respiratoires basses précoces à VRS. Parallèlement, une évaluation de leur fonction respiratoire est réalisée à l’âge de 36 ans, dans le but de mieux comprendre les liens entre certains événements moléculaires précoces et le développement ultérieur d’une BPCO.
18e Congrès international de pneumologie pédiatrique, Chiba-Tokyo (Japon) qui a eu lieu du 27 au 30 juin 2019.
Session topique : « Lung function trajectories from childhood to adult life: determinants and interventions studies ». D’après Fernando D. Martinez, Tucson, Etats-Unis.