Exemple de la médecine personnalisée en pneumologie, le benralizumab est un « outil qui nous manquait pour le sous-groupe de patients souffrant d'asthme sévère à éosinophiles, soit 20 à 30 % des 200 000 asthmatiques sévères français », estime le Pr Gilles Devouassoux, chef du service de pneumologie à l'hôpital de La Croix Rousse à Lyon (hospices civils de Lyon) et principal investigateur de l'essai SIROCCO (qui rassemble les patients les plus sévères, ayant connu 3 exacerbations l'année précédant l'inclusion).
Cette pathologie touche 10 % des 315 millions d'asthmatiques dans le monde, dont 40 % d'entre eux restant mal contrôlés par un traitement associant un corticoïde inhalé à dose élevée et un bronchodilatateur bêta-2 mimétique d'action longue.
Jusqu'à - 51 % de réduction des taux d'exacerbation
Ont été inclus quelque 2 511 patients (1 205 dans l'essai SIROCCO et 1 306 dans CALIMA) de 12 à 75 ans souffrant d'asthme sévère et présentant au moins deux exacerbations l'année précédant l'inclusion.
Deux posologies ont été testées et comparées à un placebo : 30 mg toutes les 4 semaines, ou 30 mg toutes les 4 semaines pour les 3 premières injections, puis 8 semaines, pendant 56 semaines pour SIROCCO, et 60 semaines pour CALIMA.
Chez les patients présentant un taux sanguin d'éosinophiles supérieur à 300 cellules/µL, le benralizumab se révèle significativement efficace avec une baisse significative du taux d'exacerbation annuel. Dans l'essai SIROCCO (809 patients avaient un taux d'éosinophiles très élevé), le taux annuel diminue 45 % par rapport au placebo (0,73 contre 1,33) et de 51 % (0,65 contre 1,33) dans le schéma à 8 semaines. Dans l'essai CALIMA, ces taux ont baissé respectivement de 36 % et de 28 %.
Meilleure qualité de vie
Le benralizumab s'est révélé particulièrement efficace chez les patients les plus sévères ayant connu plus de 3 exacerbations l'année précédant l'inclusion, dans les deux études, a souligné le Pr J. Mark Fitzgerald (Severe Asthma Clinic, VGH, University of British Columbia) lors de la présentation des résultats. La diminution des exacerbations est ainsi de 57 % pour le schéma à 8 semaines dans SIROCCO et 51 % dans CALIMA, et de 46 % pour le schéma sur 4 semaines dans SIROCCO et 45 % dans CALIMA. Et le temps avant la première exacerbation s'étire, avec une diminution de 37 à 40 % de probabilité d'en connaître une dans l'essai SIROCCO.
En outre, le benralizumad augmente significativement la fonction pulmonaire chez les patients avec un taux d'éosinophiles supérieur à 300 cellules par µl (jusqu'à + 159 ml dans le schéma à 8 semaines, dans l'essai SIROCCO) et présentant un plus fort risque d'exacerbation, notamment dès la première injection.
Le schéma avec une injection toutes les 8 semaines réduit signification le score total des symptômes quotidiens d'asthme par rapport au placebo. « Le traitement, moins intrusif, apporte ainsi une nette amélioration de la qualité de vie pour les patients avec moins d'hospitalisations », a commenté le Pr Fitzgerald. « On observe aussi une amélioration de la symptomatologie nocturne et de la fonction respiratoire », note le Pr Devouassoux.
Les effets indésirables sont similaires, en termes de nature et de fréquence, à ceux observés avec le placebo. La publication du « Lancet » rapporte l'aggravation de l'asthme (13 % dans SIROCCO), et des rhinopharyngites (12 % dans SIROCCO, autour de 20 % dans CALIMA). Trois effets indésirables graves ont été reliés par les auteurs aux traitements dans SIROCCO dans la cohorte à 4 semaines (angéite granulomateuse allergique, attaque de panique et paresthésie), et 4 dans l'essai CALIMA (urticaire, zona, asthme).
Demain, les médecins auront donc à choisir, parmi leur arsenal thérapeutique, entre le mépolizumab (GlaxoSmithKline) le reslizumab (Teva), deux anti-IL5, le benralizumab (avec une activité biologique probablement supérieure car ciblant un récepteur), et l'omalizumab (l'anti IGe de novartis), commercialisé depuis 2006. « Il faudra encore beaucoup de recherche clinique pour choisir les outils les mieux adaptés à chaque patient ; les médecins commenceront sûrement de manière empirique », commente le Pr Devouassoux.
Le groupe AstraZeneca devrait déposer un dossier d'autorisation de mise sur le marché européen d'ici à la fin de l'année 2016.