« Le pharmacien de demain, nous y sommes arrivés, estime Christian Grenier, président de Federgy, la chambre syndicale des groupements et enseignes de pharmacies. Une puissante transformation est en train d’arriver. Nous sommes partis sur le numérique à fond, comme un outil qui sera indispensable pour faire notre métier. Le numérique va accompagner le patient, mais aussi le pharmacien, du côté commerce et du côté métier », assure-t-il.
« La profession est à la frontière de trois pôles : professionnel de santé, commerçant, et prestataire de services, ce qui comprend par exemple la préparation des doses à administrer, la livraison, la dispensation à domicile », poursuit-il. Pour lui, en signant l’avenant 11 en juillet 2017, la profession à fait le choix d’être professionnel de santé et de ne pas basculer du côté commerçant. Dans ce contexte, le numérique bouleverse tous les métiers et s’inscrit dans les trois pôles de la pharmacie. « C’est le virage 3.0 de la distribution pharmaceutique, de la distribution des soins et de la distribution des services », affirme Christian Grenier. Il invite les pharmaciens à prendre ce virage numérique, que ce soit sur les réseaux sociaux ou dans le domaine des données de santé. « Le pharmacien peut jouer un rôle de centralisateur de ses données pour le patient, mais aussi pour les autres professionnels de santé », souligne-t-il. Il peut aussi utiliser les outils numériques fournis par son groupement et, étape ultime, devenir un professionnel de santé coordinateur des soins. « Le pharmacien va avoir accès à l’ensemble du dossier médical partagé (DMP) du patient si celui-ci donne son accord. Il va falloir être hypercompétent », met-il en garde.
Deux euros la minute
Il ajoute que, bientôt, tout va être dématérialisé. « L’ordonnance par exemple, sera directement sur un site de la Sécurité sociale, la carte Vitale sera dématérialisée, le dossier médical aussi, et pour la vaccination, nous aurons un calendrier de vaccination virtuel. »
En parallèle de tous ces nouveaux outils, il insiste sur le fait que le pharmacien devra avoir un exercice professionnel fort. « Nous aurons davantage de face-à-face patient, que ce soit à la pharmacie, au domicile ou autre (en dehors des murs de l’officine), mais aussi davantage de relations avec les autres professionnels de santé. Le face-à-face patient va vous prendre tout votre temps ! » lance-t-il. Pour lui, le « temps pharmacien » se chiffre à deux euros la minute. « Si un entretien dure au-delà de 20 minutes, à 40 euros l’entretien, on perd de l'argent, calcule-t-il. L’augmentation des compétences, la coordination, le réseau, le DMP, vont être très chronophages. Certaines choses vont consommer du temps et ne vont pas forcément être rentables, mais ça sera la mécanique globale du métier. Le pharmacien est dans l’obligation de changer le concept de son mode d’exercice », affirme-t-il.
« Aujourd’hui, l’évolution du métier est très positive, mais tout ce qui est bon pour l’exercice professionnel pose problème pour le business de l’officine, notamment en termes d’organisation, de rémunération, de marge », fait-il remarquer. De plus, « la pharmacie connectée nous obligera à repenser le mode d’exercice professionnel ». Pour résumer, Christian Grenier souligne qu’en 2019, « le concurrent de tous sera le numérique, l’allié de tous sera le numérique. Il sera incontournable », conclut-il.