« IL N’EST pas concevable de laisser aux jeunes générations une pharmacie dépassée. Il n’est pas non plus concevable de saccager l’espérance de tous ces jeunes. Attirer et intégrer les jeunes est une clé de voûte de l’avenir de notre profession », estime Isabelle Adenot, présidente du Conseil national de l’Ordre des pharmaciens, lors de la 27e Journée de l’instance, lundi dernier. Déterminée à défendre les valeurs de la profession, Isabelle Adenot, l’affirme, « faire croire dans un monde globalisé, libéral, que l’absence de règles serait la solution à tous les maux, est un leurre ».
Aussi, la présidente de l’Ordre se félicite du soutien apporté par la ministre de la Santé lorsque les piliers de l’officine tremblaient sous les coups de boutoirs des pro-dérèglementation. « Vous n’avez pas accepté l’inacceptable, comme la mise à disposition des médicaments hors des pharmacies, qu’elles soient physiques ou virtuelles, lance-t-elle en direction de la ministre de la Santé qui a répondu présente à l’invitation de l’instance ordinale. Vous n’avez pas accepté le démantèlement des règles démo-géographiques de l’officine qui ont fait leurs preuves en matière de proximité territoriale. Pour cette détermination, ce bon sens, les pharmaciens, les 1 000 présents aujourd’hui et tous les autres, vous remercient. » Des remerciements accompagnés d’applaudissements nourris venant de la salle.
Mais pour Isabelle Adenot, des évolutions sont toutefois nécessaires. « Au nom de l’ensemble de l’institution ordinale, je ne laisserai pas mettre en danger sans réaction vigoureuse et déterminée le sens et les valeurs de notre profession, explique-t-elle. Je ne laisserai pas non plus la profession s’enfoncer dans le piège mortifère du passéisme nostalgique. » Sa devise : « Se réformer au bon rythme, sans se perdre. »
L’importance des officinaux.
« Je sais que vous êtes prêts à faire évoluer votre profession », a répondu Marisol Touraine dans son discours. Peu habituée à se rendre aux manifestations organisées par la profession, la ministre de la Santé est toutefois fidèle à la Journée de l’Ordre. Et elle s’est voulue rassurante : « Je suis venue vous dire l’importance que j’accorde à la place des pharmaciens dans notre système de santé. » La ministre a également réitéré son attachement au maillage territorial et réaffirmé son opposition à la vente de médicaments en grande surface. À ses yeux, la dispensation ou l’achat d’un médicament doit obligatoirement s’accompagner d’un conseil de bonne utilisation. Car pour elle, nous consommons encore trop de médicament en France, « près d’une boîte par semaine et par personne ». Dans ce contexte, elle « ne souhaite pas encourager l’automédication, en faire un élément de régulation des dépenses d’assurance-maladie ». La ministre de la Santé confirme par ailleurs qu’elle présentera dans les prochaines semaines un plan d’action en faveur du développement des génériques.
Au chapitre des mesures favorables aux officinaux, Marisol Touraine y range le nouveau mode de rémunération à venir. Grâce à cette réforme, « la rémunération des pharmaciens dépendra désormais moins des prix des médicaments et davantage des objectifs de santé publique », souligne-t-elle. D’autres dispositions concernant l’évolution de la profession sont d’ores et déjà programmées. La ministre confirme en effet que sa future loi de santé contiendra des mesures en faveur de la simplification des règles d’installation, de transfert et de regroupement d’officines, mais aussi en faveur de l’entrée des jeunes pharmaciens dans le capital des pharmacies. L’extension des compétences des pharmaciens à la pratique de vaccinations y figurera aussi. « Seuls les pharmaciens qui le souhaitent pourront s’engager dans cette voie, une formation sera proposée et il y aura une articulation avec le médecin traitant », précise la ministre. « Ce n’est pas à la place de, mais en plus de… », insiste-t-elle. Une façon de clore la polémique.