Gabriel, 19 ans, aime piloter des avions. Victoire,16 ans, est championne d’équitation. Tout deux sont épileptiques, et alors ? « Yes we can » clame en leur nom l’association de patients Épilepsie France à l’occasion de la journée internatioiale dédiée à cette pathologie, ce lundi 8 février. Un message qui porte l’idée que la pratique d’un sport, y compris celle d’un sport de haut niveau, est possible pour les patients épileptiques.
L’épilepsie un trouble neurologique à multiples formes et manifestations qui concerne 1 % de la population. En France, on compte 500 000 personnes épileptiques. Face au risque de crise et aux idées reçues, les malades tendent à renoncer à la pratique d’un sport. L’association mène, dans ce contexte, un double combat, d’une part pour l’accueil de ces personnes au sein des fédérations sportives, d’autre part pour convaincre les médecins que le rapport bénéfice-risque penche sans conteste du côté de la pratique sportive.
Des bienfaits psychologiques incontestables
D’autant que ces derniers sont prescripteurs de certificats médicaux, sésames indispensables pour accéder à la compétition. Gabriel a pu réaliser son rêve de voler grâce à l’aéro-club Paul-Louis Weiler des Mureaux, spécialisé dans l’accompagnement des personnes handicapées. Victoire a, elle, poursuivi la compétition, dans son club habituel, après le diagnostic de son épilepsie, alors qu’elle souffre d’une forme grave de la maladie qui se manifeste par une centaine de « crises » par jour. Cours moments d’absence ou le cerveau déconnecte. « Mais cela ne se produit jamais quand je suis à cheval, affirme la jeune fille. Car je suis très concentrée. » À l’annonce du diagnostic, elle avait 11 ans. Le fait d’arrêter l’équitation, à la demande des médecins, la plonge en dépression… et multiplie les crises. Elle s’est donc remise en selle.
« Les bienfaits psychologiques du sport sont incontestables pour aider ces jeunes à vivre avec la maladie et à restaurer une estime de soi souvent dégradée dans ces situations » remarque le Dr Jean-Marc Pinard, neuropédiatre à l’hôpital Raymond Poincaré de Garches. « Non seulement, la pratique d’un sport n’a aucune raison d’aggraver une épilepsie, mais on peut souvent observer la diminution de la fréquence et de l’intensité des crises » soutient Laïla Addhar, présidente d’Épilepsie France.
La pratique sportive induit une diminution des crises
L’association organise depuis 3 ans des stages sportifs avec l’UCPA pour des adolescents épileptiques : tennis, randonnée, voile, VTT… « Et il n’y a jamais eu aucun problème » souligne-t-elle. « Une étude* atteste effectivement que chez 36 % de patients épileptiques pratiquant un sport régulier, le risque de crise décroît notablement », confirme le Dr Gilles Huberfeld, neurologue du département de neurophysiologie de la Pitié-Salpêtrière et chercheur au sein de l’unité INSERM « Épilepsie de l’enfant et plasticité cérébrale ».
« Les états de vigilance extrême ont tendance à bloquer les mécanismes de l’épilepsie, précise-t-il. Produire un effort physique intense induit une augmentation des mécanismes anaérobies, tout particulièrement au niveau des neurones. Les recherches montrent que cela a un effet bénéfique sur le cerveau des patients épileptiques. La pratique sportive provoque également une élévation du stress, et avec elle une augmentation de la concentration de neurostéroïdes qui peuvent avoir un effet protecteur sur les neurones. »
L’importance de l’éducation thérapeutique des patients
Mais le chercheur met toutefois en garde sur la situation de « descente » qui suit l’exercice physique : la diminution du stress crée alors, dans le cerveau un état de déséquilibre, « un moment délicat à prendre particulièrement en compte par les personnes épileptiques. » Laïla Addhar souligne l’importance pour les patients de bien comprendre leur maladie, pour mieux l’assumer.
Cette éducation thérapeutique ouvre, selon elle, le dialogue avec les médecins qui endossent plus volontiers un rôle d’accompagnement dans la pratique sportive. En tout état de cause, peu de sports sont aujourd’hui contre-indiqués. Restent ceux qui font courir un grand danger en cas de crise : plongée, surf… équitation. Pour l’heure, en France, 60 % des personnes épileptiques pratiquent un sport.