Des pharmaciens qui s'expriment dans les médias, ça n'est pas une nouveauté ! Mais aujourd'hui, les possibilités qu'offre l'outil Internet ont démultiplié les occasions de communiquer, notamment par le biais des sites et réseaux sociaux. Y être présent est même une évidence pour certains qui estiment que ces médias sont un passage obligé dès lors que l'on possède un site Internet au nom de sa pharmacie. Témoin de cette logique, le média social YouTube diffuse à foison les vidéos de pharmaciens expliquant les spécificités du métier - délivrance des médicaments, conseil au public... - ou les difficultés d'exercer en période de crise sanitaire. Certains sont allés plus loin comme ce pharmacien lillois qui a créé, il y a quelques années, la chaîne YouTube PharmaSilica dans le but de répondre aux questions liées à la santé et à la pharmacie. Dans les témoignages qu'il a pu livrer, il explique son intention de partager ses connaissances et son expérience quotidienne au comptoir avec le plus grand nombre de personnes sur Internet, une initiative que lui auraient inspiré les demandes - « Comment fonctionne mon traitement ? », « Y a-t-il des effets indésirables ? » - souvent récurrentes des patients. En résulte une série de vidéos expliquant le fonctionnement et la technologie mis en œuvre par les médicaments, dispositifs médicaux et produits divers que l'on peut trouver en pharmacie : aromathérapie et huiles essentielles, le paracétamol et ses différentes présentations, les tests de grossesse, les antibiotiques … sont ainsi expliqués en images, avec des mots simples et d'une façon ludique.
Des « vues » et des « like »
Constance Coquerel, adjointe à Villeneuve d'Ascq, anime également une chaîne YouTube ainsi qu'une page Facebook et un compte Instagram, le tout au nom de sa pharmacie. « L'officine en ligne reste encore peu accessible pour un grand nombre de personnes. Les réseaux sociaux, en revanche, nous permettent d'être facilement en contact avec le public, d'être disponibles et proche des internautes ». Dispenser des conseils pratiques en direct, communiquer sur les services que l'on peut trouver à l'officine, mettre en avant le rôle du pharmacien, informer sur les possibilités de vente en ligne des produits de santé, faire connaître le site Internet de son officine, en un mot, rendre la pharmacie digitale, sont quelques unes des raisons qui expliquent son implication dans les réseaux sociaux. « On ne promeut pas notre activité mais on communique sur notre expertise de professionnel de santé. Les sujets abordés sous forme de texte, photos, films, sont tellement variés sur Internet ! Pourquoi ne pas parler nous aussi de ce que l'on connaît et aborder, d'une façon qualitative, des questions de santé comme le fonctionnement de la pilule, la façon d'éviter une mycose vaginale ou de gérer les maux de tête ».
D'autant que la méthode à suivre pour publier un contenu en images n'est pas insurmontable : « On choisit un sujet qui nous intéresse, on se filme avec son téléphone portable, on publie la séquence sur le réseau en l'accompagnant d'un texte de quelques lignes ». Pour assurer deux à trois publications par semaine, il faudra compter deux heures de travail hebdomadaires auxquelles viendra s'ajouter une heure par jour consacrée à répondre aux questions et aux commentaires que les internautes ne manquent pas de laisser. « C'est une activité quotidienne », reconnaît l'adjointe, « mais elle permet de créer une proximité et d'entretenir le contact avec le public. Dans ce contexte, il est beaucoup plus facile de transmettre un contenu de santé ». Plus simple aussi d'aborder les sujets tabou qui, en face à face au comptoir, peuvent créer un malaise chez la clientèle et ne pas être approfondis comme ils le devraient. « En ligne, ces questions interpellent les internautes qui nous questionnent sans retenue ». Et l'intérêt du public, quantifié instantanément, ne peut passer inaperçu sur les réseaux sociaux. Constance Coquerel compte ainsi 8000 abonnés sur YouTube, 1 400 sur Instagram et 18 000 sur Facebook... Sans parler du nombre de « vues » ou de « like » enregistrés...
Apporter des clefs
Moins en prise avec le grand public mais totalement dédiée à l'information de ses auditeurs, la radio compte aussi quelques adjoints parmi ses intervenants. Depuis un an, Elya Meynieu contribue ainsi à l'élaboration de plusieurs émissions proposées par Pharmaradio, radio diffusée sur Internet ciblant toute la profession pharmaceutique. Sujets d'actualité dans le Pharma Show, veille sanitaire assurée à l'antenne pendant le confinement, chronique pratico-pratique (les poux, les anticoagulants, la vaccination...) destinée aux officinaux pour le Mag des Pharmaciens, les thèmes abordés sont très divers, presque autant que les formats des émissions auxquelles elle collabore. « En tant qu'officinale, je voulais diversifier mes activités et appliquer mes connaissances scientifiques à un autre cadre que celui de l'exercice au comptoir », confie l'adjointe. « Chercher des informations pour étayer un sujet, approfondir un thème de santé sont des pratiques plus évidentes à mettre en œuvre quand on travaille pour un média ». Revisiter les sujets, suivre une actualité très changeante, apporter des informations en temps réel... et rencontrer des spécialistes offrent une autre approche des thèmes de santé à laquelle les jeunes pharmaciens ne sont pas forcément préparés. Au final, c'est une activité complémentaire de l'officine – désormais fréquentée à mi -temps - que celle de transmettre un contenu d'information avec, qui plus est, un objectif commun qui est celui d'apporter des clefs à l'auditeur, confrère ou patient. La radio fait également partie des multiples médias auxquels David P., pharmacien et journaliste, contribue...
Sa présence à l'officine réduite à quelques jours par mois, l'adjoint consacre désormais la plupart de son temps de travail à l'information pharmaceutique qu'il traite sous toutes les coutures dans des supports et des formats très différents : actualité au quotidien dans le Flash Info, cas de comptoir pour le Mag des Pharmaciens, deux émissions de Pharmaradio dont il a, par ailleurs, initié la création ; thématiques de santé au quotidien à destination du grand public dans La Vie en Bleu sur la fréquence France Bleu Poitou ; actualité du médicament, conseils à l'officine, dossiers mensuels qu'il développe pour différentes rubriques dans la presse professionnelle... A cet éventail ne manque que la télévision, un média où la profession de pharmacien d'officine est trop rarement représentée selon l'adjoint : « Au même titre que les médecins qui ont su prendre leur place dans le paysage médiatique, le pharmacien doit assumer ses connaissances aux yeux du public ». Et de souligner l'absence de pharmaciens consultants pour commenter l'actualité lors des nombreuses tables rondes organisées à la télévision durant la période du confinement, difficile à comprendre sachant à quel point ils auraient pu éclairer les débats et apporter nombre d'informations utiles. « Les médias ne se tournent pas vers les pharmaciens quand il est question de médicament alors qu'il s'agit là de notre expertise », constate David P. « Nous devons assumer notre rôle de professionnel de santé et prendre part de façon pérenne au débat public. L'enjeu est aussi celui de l'éducation à la santé ».