« Les traitements anti-CD20 posent problème dans la SEP vis-à-vis de la vaccination, car ils ont un effet sur les lymphocytes B qui produisent les anticorps », rappelle au « Quotidien » le Pr Jean Pelletier, neurologue à l'hôpital de la Timone, à Marseille. Dans une moindre mesure, le fingolimod entraîne aussi une réponse humorale affaiblie face à la vaccination.
201 fois moins d'anticorps avec l'ocrélizumab
Quelque 780 patients atteints de SEP ont été inclus dans cette étude multicentrique : 76 % ont reçu le vaccin de Pfizer et 24 % celui de Moderna. Des prélèvements sanguins, réalisés avant la vaccination et quatre semaines après, montrent que 86,8 % des patients ont développé des anticorps détectables contre le SARS-CoV-2.
Dans l'étude, les patients étaient non traités (11,2 %), sous ocrélizumab (19,7 %), sous rituximab (3,2 %), sous fingolimod (10,9 %), sous cladribine (3,2 %) ou traités par d'autres DMT (51,7 %). Par rapport aux patients non traités, les taux d'anticorps étaient diminués pour ceux sous ocrélizumab (de 201 fois), sous fingolimod (de 26 fois) et sous rituximab (de 20 fois).
« L'étude montre également que les patients répondent mieux s'ils sont vaccinés à distance des cures d'anti-CD20 [ocrélizumab et rituximab], résume le Pr Pelletier. Nous avions déjà recommandé de ne pas hésiter à espacer les cures, mais initialement, l'objectif était surtout d'éviter de faire venir les patients à l'hôpital et de leur faire prendre des risques à cause du Covid. » Avec son équipe, le Pr Pelletier a publié une étude dans « Neurology » démontrant que l'espacement des cures n'a pas d'impact sur l'efficacité du traitement. « Les cures peuvent même être espacées d'un an à un an et demi », précise-t-il.
3,25 fois plus d'anticorps avec Moderna
Les résultats montrent également que le vaccin de Moderna est associé à un niveau d'anticorps systématiquement 3,25 fois plus élevé par rapport au Pfizer. « Il s'agit du premier papier à faire la différence entre les deux vaccins », note le neurologue. Ces données obtenues à quatre semaines sont donc à confirmer.
D'autant qu'« une des limitations importantes de l'étude, comme le soulignent d'ailleurs les auteurs, c'est qu'ils ont contrôlé l'immunité vaccinale à quatre semaines après la vaccination. Or, les données tendent à montrer qu'il faut un peu plus de temps, plutôt huit semaines, pour parvenir à une bonne immunité vaccinale », relève le Pr Pelletier.
Les auteurs estiment néanmoins que « cette observation peut avoir une incidence sur le choix du vaccin chez les patients traités par anti-CD20 et fingolimod », tout en soulignant que « des informations supplémentaires sur la réponse cellulaire sont nécessaires pour affiner la stratégie de vaccination chez ces patients ».
En France, l'étude CovPopart, lancée en avril par l'INSERM, devrait apporter de nouveaux éléments. L'étude porte sur la réponse vaccinale dans 13 pathologies, dont la SEP et les maladies apparentées (avec 600 patients inclus). Le suivi démarre le jour de la vaccination, puis à un mois, six mois, un an et à deux ans. Les résultats à six mois devraient être connus d'ici à début 2022, avance le Pr Pelletier. « Nous aurons des éléments plus précis sur la réponse vaccinale en fonction de chaque traitement de la SEP », note-t-il. Le neurologue rappelle qu'en France, une troisième dose de vaccin est recommandée chez les patients sous anti-CD20.