- Je ne peux pas vous conseiller une solution plus qu’une autre. Comme je vous ai expliqué, que ce soit le vaccin ou le Beyfortus, l’efficacité est assez similaire, dit tranquillement Marion, d’un ton rassurant.
En face d’elle, la jeune femme caresse son ventre arrondi et tourne le regard vers son mari.
- Alors ? On fait quoi ?
- Si je peux me permettre, vous avez encore quelques jours pour vous décider. Vous venez d’entamer le 8e mois de grossesse, ajoute la pharmacienne.
- Moi, ce qui m’embête si on choisit Bey machin truc, c’est que ça fait une piqûre de plus au petit bout, argumente le futur père.
- Oui mais regarde, répond sa compagne en pointant du doigt un paragraphe du document HAS que Marion leur a imprimé. C’est écrit qu’il y a un risque d’accouchement prématuré.
- Rapporté avec un vaccin concurrent, pour être très précis, complète Marion.
La jeune femme mordille ses lèvres puis soupire.
- C’est si embêtant que ça la bronchiolite ?
- Enfin Sophie, tu ne te souviens pas comment ma sœur était inquiète quand il a fallu hospitaliser le petit Achille ? Nous avons le moyen de protéger notre bébé contre la bronchiolite, alors faisons-le.
Alors que le couple s’éloigne, Marion écoute d’une oreille les propos du client dont s’occupe Kenza au comptoir d’à côté.
- Du volley assis au sol ou du rugby en fauteuil, c’est pas pareil. J’arrive pas à être dans le match comme avec des joueurs normaux…
Sa femme lui fait les gros yeux pour le faire taire :
- Quoi ? Ce n’est pas parce que la pharmacienne est en fauteuil roulant que je ne peux pas dire ce que je pense. Hein ?
- Merci Madame, mais ce que dit votre mari ne me vexe nullement.
La pharmacienne le fixe des yeux et poursuit :
- Venez donc me voir m’entraîner à l’escrime le mardi soir. Je saurai vous prouver que même en fauteuil roulant, nous pouvons passionner le public.
- Ah ? Vous faites de l’escrime ?
- Oui, je suis vice-championne de France.
- Ah oui quand même ! Tu vois Catherine, Madame n’est pas vexée, réplique l’homme d’un air triomphal.
- T’es un champion toi, champion de la gaffe oui !, répond sa femme en levant les yeux au ciel.
Une fois le couple parti, Marion s’approche de sa collègue :
- Tu as été parfaite. Le coup de l’escrime, magnifique. Tu lui as donné l’estocade. Mais c’est vrai que tu es vice-championne ?
Kenza sourit.
- Oui, c’est vrai. Du moins, je l’ai été jusqu’à l’année dernière. Avec le boulot, l’âge aussi, j’ai freiné un peu la compétition.
- Je comprends mieux ton assurance et ton sang-froid dans toutes les situations. On dit que l’escrime est un sport de courage et de respect.
- Si je pouvais conserver ce sang-froid dans deux semaines, pour le procès de Pinson, soupire Kenza.
Les deux collègues tournent soudain la tête vers le back-office.
- Lou, tu tousses beaucoup. Tu as vu le médecin ?
- Non pas encore. Ma fille est malade, elle a dû me refiler ses microbes.
Kenza et Marion se regardent, d’un air convenu :
- Cette toux est quand même préoccupante.
- Par quintes…, complète Marion sans aller plus loin dans sa réflexion. Il faut vraiment que tu prennes rendez-vous chez le médecin sans tarder. En attendant, masque obligatoire ma Lou.
(À suivre…)