Au procès en appel du scandale sanitaire du Mediator, l'assurance-maladie a réclamé le remboursement de 486 millions d'euros par le groupe Servier, estimant que le laboratoire l'avait trompée afin de maintenir le plus longtemps possible le remboursement du Mediator.
Devant la cour d'appel de Paris, Georges Holleaux, avocat du régime général de l'assurance-maladie, a affirmé que le laboratoire pharmaceutique s'était servi d'elle comme d'une « vache à lait ». L'assurance-maladie réclame donc le remboursement par le groupe Servier de 486 millions d'euros au regard du préjudice qu'elle estime avoir subi : 349 millions d'euros pour le remboursement des boîtes de Mediator, 9 millions d'euros pour les échocardiographies prises en charge après 2009 afin de dépister les éventuelles séquelles chez les patients et 128 millions d'euros pour les intérêts cumulés.
Le Mediator, médicament antidiabétique largement vendu comme coupe-faim, a été prescrit pendant plus de 30 ans à cinq millions de personnes en France, jusqu’à son retrait du marché en 2009. Il a entraîné de graves effets cardiovasculaires chez des milliers de patients, dont des valvulopathies cardiaques et des hypertensions artérielles pulmonaires, et il est tenu pour responsable de centaines de décès.
Le groupe Servier est rejugé, depuis janvier 2023, pour « tromperie aggravée », « homicides et blessures involontaires », « obtention indue d'autorisation de mise sur le marché » et « escroquerie » au préjudice notamment des caisses de Sécurité sociale et des mutuelles. En première instance, en mars 2021, le groupe avait bénéficié d'une relaxe pour cette dernière infraction. En effet, le tribunal correctionnel avait estimé que Servier n'avait pas fait preuve de « manœuvres frauduleuses » constitutives de l'escroquerie puisque la Haute Autorité de santé (HAS) avait conclu à plusieurs reprises que le Mediator présentait un service médical rendu (SMR) insuffisant, et donc qu'il était connu de tous que son efficacité n'était pas démontrée.
« Une erreur manifeste d’appréciation (...) des mécanismes de l’assurance-maladie », a argumenté Géraldine Brasier Porterie, avocate de la Sécurité sociale agricole MSA. Par ailleurs, même si l'assurance-maladie « avait connaissance du comportement frauduleux, elle n'avait pas les moyens d'y mettre fin », a aussi expliqué Me Holleaux, la décision de rembourser ou de ne pas rembourser étant du ressort du ministre de la Santé.
Le procès en appel s’est ouvert le 9 janvier et se poursuivra jusqu’au 28 juin au Palais de justice de Paris.