La déficience en vitamine D est fréquente dans la population, particulièrement en hiver et d’autant plus chez les sujets âgés ou à peau foncée. Alors qu’elle joue un rôle clé dans l’immunité innée et acquise et pourrait conférer une protection contre certaines maladies infectieuses (bactériennes et virales), trois études observationnelles ont évalué l’effet de la vitamine D face au Covid-19.
La vitamine D n’est synthétisée dans le derme que sous l’effet des rayons UVB du soleil et les aliments en apportent peu (on en trouve surtout dans les poissons gras). L’Académie nationale de médecine a recommandé fin mai une supplémentation : « une mesure simple, peu coûteuse et remboursée par l’assurance-maladie » qui ajoute-t-elle, « pourrait être considérée comme un adjuvant à toute forme de thérapie ».
Une protection contre les formes graves
De nouvelles données sont venues étayer cette hypothèse à la rentrée de septembre. L’équipe dirigée par Maghbooli (1) a analysé les données de 235 patients traités pour Covid-19 (progression sévère pour 3/4) dans un hôpital de Téhéran (Iran) entre mars et mai. Un tiers des patients avait un bon taux de vitamine D sérique (supérieur ou égal à 30 ng/ml). L’étude publiée fin septembre révèle une association indépendante (après ajustement des facteurs confondants) entre un bon taux de vitamine D et un plus faible risque de progression sévère (hypoxie…) et de mortalité.
Ainsi, au-delà de 40 ans, les patients Covid-19 ayant un taux normal de vitamine D avaient une mortalité hospitalière de seulement 9,7 % versus 20 % pour ceux ayant des taux de vitamine D sous-optimaux, ce qui correspond à une baisse de 50 % du risque de décès. Un bon taux de vitamine D était aussi associé à un plus faible taux de protéine C réactive, un marqueur inflammatoire, et à un taux sanguin supérieur de lymphocytes. « Cette étude fournit la preuve directe qu’un bon taux de vitamine D peut réduire les complications, notamment l’orage cytokinique, et ultimement le décès par Covid-19 », estime dans un communiqué le Dr Michael Holick, professeur de médecine, physiologie et biophysique à l’Université médicale de Boston, qui a dirigé l’étude.
Moins d’infections par le coronavirus
Une autre étude rétrospective dirigée par le Dr Holick (2) suggère qu’un taux optimal de vitamine D pourrait réduire de moitié le risque de contracter l’infection par le nouveau coronavirus. En utilisant les tests du laboratoire américain Quest, l’équipe a apparié le test diagnostique du SARS6CoV-2 (PCR) réalisé entre mi-mars et mi-juin chez environ 190 000 personnes et le test de vitamine D sérique réalisé l’année précédente chez ces mêmes sujets.
Le résultat est intéressant. Alors que le taux d’infection au SARS-CoV-2 (test PCR positif) est de 12,5 % chez les patients ayant un déficit en vitamine D (< 20 ng/ml ; 39 190 patients), il baisse à 8 % chez les patients ayant un taux de vitamine D adéquat (30 à 34 ng/ml ; 27 870 patients) ; et le taux d’infection chute à 5,9 % chez les patients ayant un taux encore plus élevé de vitamine D (≥ 55 ng/ml ; 12 321 patients). L’association reste significative après ajustements multiples. « La positivité du test PCR est inversement associée au taux de vitamine D sérique, quels que soient la latitude, la race/ethnicité, le sexe et la tranche d’âge. Nos résultats invitent à explorer le rôle de la supplémentation en vitamine D pour réduire le risque d’infection par le SARS-CoV-2 et le risque de la maladie COVID-19 », concluent les chercheurs.
De façon similaire, une étude rétrospective menée en Israël sur plus de 7 800 individus (10 % avec test PCR positif), publiée dans le journal FEBS (3), suggère également qu’un faible taux sanguin de vitamine D (< 30 ng/ml) constitue un facteur de risque indépendant pour l’infection par le SARS-CoV2 (OR = 1,58) et l’hospitalisation pour Covid-19 (OR = 2).
Plusieurs études randomisées évaluent actuellement la supplémentation en vitamine D pour la prévention ou le traitement adjuvant du Covid-19. En attendant leurs résultats, les données de ces trois études observationnelles valident le bien-fondé d’une supplémentation préconisée par l’Académie nationale de médecine dès ce printemps.
Ainsi, l’Académie recommande :
– chez les personnes âgées de plus de 60 ans atteintes de Covid-19, « de doser rapidement le taux de vitamine D sérique (c’est-à-dire la 25 OHD) et d’administrer, en cas de carence, une dose de charge de 50 000 à 100 000 UI qui pourrait contribuer à limiter les complications respiratoires » ;
– chez les personnes âgées de moins de 60 ans, « d’apporter une supplémentation en vitamine D de 800 à 1 000 UI/jour, dès la confirmation du diagnostic de Covid-19 ».
(1) Z. Maghbooli et al., PLOS One, 2020, 10.1371/journal.pone.0239799.
(2) H. Kaufman et al., PLOS One, 2020, 10.1371/journal.pone.0239252.
(3) E. Merzon et al., FEBS Journal, 2020, 10.1111/febs.15495.