Les pharmaciens québécois débuteront le 1er novembre leur première campagne de vaccination antigrippale, comme le font déjà leurs confrères du Canada anglophone. 25 % d’entre eux ont été formés à cet acte, pour lequel ils toucheront 16,50 dollars, (10,25 euros), dont 5 dollars de supplément lié aux mesures de protection contre le Covid-19. Le président de l’Ordre du Québec, Bertrand Bolduc, souligne que la vaccination concernera tout le monde dès 6 ans, et sera prescrite par le pharmacien, puis effectuée soit par ses soins, soit par une infirmière travaillant avec lui.
Si la vaccination officinale est « née » en Argentine dans les années 1980, la Suisse a été le premier pays francophone à la mettre en place, en 2015, après 5 ans de préparation. Très prudents, les pharmaciens n’y vaccinent que les personnes en bonne santé, et refusent même les femmes enceintes. Selon Claudine Leuthold, chargée du dossier à l’association PharmaSuisse, la vaccination officinale est si bien acceptée que des médecins envoient leurs patients à l’officine pour la réaliser. Les pharmaciens belges, eux, luttent toujours pour obtenir ce droit, avec le soutien des médecins qui estiment qu’ils gagneraient ainsi du temps, explique le président de l’Association pharmaceutique belge, Lieven Zwaenepoel. Il espère que le Covid-19 hâtera cette évolution, d’abord vis-à-vis de la grippe, puis pour d’autres maladies : elle a en tout cas remis la question sur le devant de la scène. Rappelant que la vaccination constitue la grande priorité de la FIP, le président de cette dernière, Dominique Jordan, appelle d’ailleurs tous les pharmaciens à « se saisir de l’opportunité que représente le Covid-19 » dans ce domaine.
Plus-value
En France, explique Alain Delgutte au nom de l’Ordre, la vaccination a renforcé la complémentarité des pharmaciens avec les autres professions, tout en illustrant la confiance du public dans l’officine et la « plus-value » qu’elle représente. Il estime que les phases d’expérimentation sont un bon moyen pour rassurer les professionnels de santé, la population et les pouvoirs publics, et permettent d’arriver plus rapidement à une généralisation. Mais dans l’immédiat, que ce soit à Paris, à Bruxelles ou à Berne, tous les officinaux sont débordés par la demande de vaccins contre la grippe. La Suisse a, par exemple, commandé trois fois plus de vaccins qu’à l’ordinaire… mais en a déjà vendu cinq fois plus.
Hors d’Europe, la vaccination officinale est autorisée en Tunisie, souhaitée par les pharmaciens marocains et pratiquée illégalement en Algérie, selon le président du Forum pharmaceutique africain, le Camerounais Prosper Hiag. En Afrique subsaharienne, les pharmaciens vaccinent les personnes qui le souhaitent. Il déplore les approvisionnements impossibles ou trop irréguliers en vaccins, et alerte en outre sur les « blocages psychologiques », qui dissuadent la population de se faire vacciner, aggravés par les propos de certains religieux qui affirment aussi aux jeunes filles qu’un vaccin contre le HPV est une « stérilisation ».
Le cas du Liban
Enfin, Dominique Jordan a rappelé le soutien apporté par la FIP aux pharmaciens libanais, qui n’ont pas encore reçu le moindre vaccin antigrippal, mais qui se débattent dans des difficultés infiniment plus graves : à Beyrouth, 25 pharmacies ont été détruites lors de l’explosion du port, et beaucoup d’autres endommagées. La vaccination officinale n’est de toute façon pas à l’ordre du jour au Liban, en raison de l’opposition absolue des médecins, ont souligné des pharmaciens lors du débat.