On ne niera pas que le couvre-feu et le confinement représentent des actions positives susceptibles de diminuer la contagion. Il se trouve qu'ils sont affreusement coûteux sur le plan économique et social. Déjà, on nous dit que les perspectives de croissance cette année seront moins brillantes qu'espéré et qu'il nous faudra beaucoup de temps, sans doute au-delà des élections présidentielles pour que le pays se relève de la pandémie. Certes, la France est liée à l'Union européenne pour ce qui est de la distribution des doses de vaccin ; certes, pour le moment, il y a infiniment moins de vaccins que de patients ; certes, il est difficile de mettre en place un système national capable de vacciner rapidement des dizaines de millions de Français.
Il n'empêche que, compte tenu de ce qui s'est passé pendant les quinze premiers jours de la campagne vaccinale, nous faisons en quelque sorte du surplace. L'accélération de cette campagne a été exigée par les élus de l'opposition, avec une hargne exceptionnelle mais tout aussi électorale, et promise par le gouvernement, avec en prime la colère du président, sincère ou feinte, contre ses collaborateurs qui auraient raté le début de la vaccination. Mais non, il en est tout autant responsable ; car rien n'est décidé sans son accord et sans celui des experts médicaux.
Alors, bien sûr, on n'a pas prévu le variant anglais ni le variant sud-africain ; on a constaté une remontée de la pandémie dans l'Est, voilà que l'Ouest du pays constate la même recrudescence. L'exécutif continue à croire que seuls le confinement et le couvre-feu (forme alternative du confinement) freineront la contamination. C'était exact tant qu'on n'avait pas de vaccin. Mais maintenant, on l'a. On en a même deux, avec Moderna, mais le temps qu'il va falloir pour vacciner tout le monde risque de faire basculer le pays dans la dépression économique, la hausse du nombre de faillites et la hausse du taux de chômage.
Fonction publique, réveille-toi !
Alors que l'organisation, dès décembre dernier, d'une formidable logistique constituée de la création de centres de vaccination d'accès facile, de l'achat du nombre nécessaire de réfrigérateurs, de communication simple avec les citoyens (par Internet ou par téléphone) en les prévenant de ce qu'on allait faire, aurait permis de vacciner plus de monde à la fois. Il ne s'agit ni de scanner, ni d'opérer des gens. Il s'agit seulement de vacciner, ce que tout soignant est capable de faire et de les mobiliser tous pour une tâche qui nous aurait immunisés collectivement, disons vers le milieu de l'année. Mais il ne faut pas rêver : ce choix-là, le gouvernement ne l'a pas fait.
C'est vraiment regrettable. La vérité est que, si nous avons le vaccin, nous n'avons sans doute pas les moyens de mobiliser assez de matériel et de personnels pour les mettre à la disposition des patients partout où ils sont. Pour ceux qui ont essayé, parce qu'ils étaient éligibles, de prendre un rendez-vous vaccinal à partir du 18 janvier, le parcours a été à la fois infernal et complètement négatif. Je peux citer mon propre exemple : une mairie totalement indifférente, un Internet qui vous laisse en rade, un téléphone que personne, jamais, ne décroche et bien que je me sois rendu physiquement dans deux hôpitaux de grande taille, on m'a répondu qu'il n'était pas question, chez eux, de vacciner, alors qu'en réalité, ils faisaient partie des 700 centres de vaccination désignés par le Premier ministre, Jean Castex, le 14 janvier.
L'exécutif n'est pas seul responsable de cette énorme carence, il est trahi par une bureaucratie définitivement inefficace à la fois dans le public et dans le privé. La première réforme à faire, c'est celle de l'État, car il y a trop de fonctionnaires payés pour répondre d'un non péremptoire en toute occasion ; après, il serait temps que la fonction publique acquière l'agilité qui lui permettrait de réagir avec efficacité à une crise.