Très mobilisés pendant la crise sanitaire, les pharmaciens ne veulent pas que leurs efforts soient oubliés lorsqu’elle sera terminée.
« Nous avons la profession la plus réactive et la plus adaptable : nous avons fait les tests antigéniques, aidé à monter des centres de vaccination, nous avons vacciné, etc. », énumère Jocelyne Wittevrongel, secrétaire générale de la Fédération des syndicats pharmaeutiques de France (FSPF). « Je suis très fière de ce que les pharmaciens ont accompli. C’était un vrai défi quotidien », renchérit Carine Wolf-Thal, présidente du Conseil national de l’Ordre des pharmaciens. Pour elle, « c’est l’ensemble de la chaîne pharmaceutique qui a permis aux pharmaciens de faire face ».
Serge Montero, directeur général de Sanofi-Pasteur France, souligne qu’il a fallu que l’industrie « se recentre sur son cœur de métier, qui est de permettre une disponibilité des médicaments pour chacun ». Il retient quatre choses de la crise : « l’humilité, l’importance de la santé, l’importance de la souveraineté nationale et la révolution technologique avec l’arrivée de l’ARN messager. »
Pour l’avenir, Duarte Santos, ancien président du groupement pharmaceutique de l’Union européenne, juge que le pharmacien pourra avoir de « nouvelles responsabilités, comme la détection précoce de maladies. Cette crise va augmenter la pression sur le système de santé. La pharmacie est la structure la plus proche des personnes. Elle peut permettre de réduire la pression sur toutes les autres entités du système de santé », estime-t-il.
Progresser sur l’interprofessionnalité
Pour Alain Grollaud, président de Federgy, « la pharmacie de proximité a fait ses preuves et le rôle de professionnel de santé s’est imposé ». Désormais, il souligne qu’au niveau des groupements, « il faut qu’on puisse progresser sur l’interprofessionnalité ». Il juge que « l’idée des CPTS est louable, mais entraîne des contraintes administratives disproportionnées ». Pour lui, il faut « une interprofessionnalité numérique autour du patient et une coopération autour de la sortie hospitalière ».
Par ailleurs, il constate qu’il manque des ressources humaines au niveau de la pharmacie. « De nombreux services sont apportés par le pharmacien et son équipe. Si demain, il y a un élargissement de la vaccination, il faut des emplois partagés, par exemple que l’infirmière puisse venir dans l’officine pour aider pour ces nouvelles missions », propose-t-il. Sur la question des biosimilaires, il déplore les retards du gouvernement, qui n’a accordé la substitution aux pharmaciens que pour deux molécules.
Côté prévention, Jocelyne Wittevrongel insiste sur la nécessité d’acter le rôle majeur du pharmacien dans la nouvelle convention. Et de faire évoluer les outils de l’interprofessionnalité, pour mieux formaliser la place du pharmacien dans l’accompagnement du patient.
« Il faudra que la nouvelle convention prenne en compte des missions comme le maintien à domicile, l’accompagnement du patient, la prévention et la gestion des sorties hospitalières, qui sont actuellement un point de rupture dans le parcours de soins », énumère-t-elle.
« Cette convention qui va s’ouvrir, c’est le champ de possibles », déclare Alain Grollaud. « Néanmoins, il faut protéger l’exercice, notamment en interdisant la publicité des plateformes européennes de vente de médicaments en ligne. Il faut que la France notifie rapidement sa décision d’interdire ces plateformes à l’Europe, sinon ce serait une grosse brèche dans le monopole », alerte-t-il. Autre point de vigilance pour les syndicats : la dispensation sous protocole. « Il ne peut pas y avoir de rupture d’égalité aux soins parce que le pharmacien ou le médecin n’appartient pas à un exercice coordonné en structure », juge Jocelyne Wittevrongel.