Nous sommes en mars 2020. Le confinement vient d'être décrété, le nombre de cas de Covid-19 explose et les moyens pour s'en prémunir, notamment le gel hydroalcoolique, ne sont pas légion. Vincent Négret, titulaire en Charente, prend alors l'initiative d'en fabriquer lui-même, en utilisant de l'alcool à 96° fourni par une maison de Cognac. Il en offre ensuite gratuitement à sa patientèle et à d'autres pharmacies des alentours.
Son initiative attire l'attention d'un journaliste de la « Charente Libre », qui décide d'y consacrer un article. Le début des ennuis pour Vincent Négret. Il se retrouve alors dans le collimateur de Pierre Béguerie, président de l'Ordre des pharmaciens de Nouvelle-Aquitaine (et président de la section A au moment des faits). Ce dernier lui reproche d'avoir utilisé de l'alcool « qui n'était pas inscrit à la pharmacopée européenne » et « d'en avoir fait la promotion » en autorisant la parution d'un article dans la « Charente Libre », ce qui s'apparente, selon le plaignant, à de la sollicitation de clientèle. Par une décision du 25 mars 2021, Vincent Négret se voit sanctionner d'un blâme et d'une inscription au dossier. « Cette sanction ne m'a pas empêché d'exercer, mais je l'ai vécue comme un déshonneur. C'était une condamnation dégradante pour moi et pour mon équipe, alors que nous avions simplement tenté de répondre aux besoins dans une période exceptionnelle de crise sanitaire », confie le pharmacien, encore très touché aujourd'hui.
Un long combat
Pour Vincent Négret, hors de question d'en rester là. Le pharmacien fait appel de sa sanction. Il met notamment en avant « qu'il n'a pas mis en danger la santé des usagers », et qu'il n'est « pas à l'origine de l'article de presse, (n'ayant) pas sollicité la journaliste pour la parution de celui-ci ». C'est le début d'un long combat qui va trouver son dénouement la semaine dernière. Deux ans après la première décision et plus d'un mois et demi après une nouvelle audience tenue devant la chambre disciplinaire de l'Ordre à Paris, l'officinal apprend par courrier recommandé qu'il a été blanchi *. « Ma condamnation est donc annulée, mon "casier judiciaire" à l'Ordre est de nouveau vierge », explique Vincent Négret. Pour gagner cette bataille, il a dû s'acquitter de frais d'avocat importants et même si la justice ordinale a fini par lui donner raison, il ne touchera pas d'indemnités, ni le moindre dédommagement pour préjudice moral. Le titulaire, son équipe et sa famille, notamment ses deux filles Alexandra et Fanny, sont simplement heureux que leur collègue et père ait pu avoir gain de cause et effacé en partie les traces de cette sanction douloureuse sur le plan moral.
* La décision peut encore faire l'objet d'un recours en cassation devant le Conseil d'État.
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