Nombre de groupements, essentiellement ceux nés au cours de la dernière décennie, ont l'enseigne inscrite dans leur ADN. C'est le cas de Pharmabest, Aprium, Pharmavance, Leadersanté ou encore de Lafayette et d'Elsie. Pour les autres, qui accélèrent aujourd'hui le mouvement, la mise sous enseigne est tout sauf une opération esthétique.
Elle répond à des critères bien définis et requiert toute l'implication du titulaire. L'investissement est aussi financier. Car la mise à l'image a son prix : entre 10 000 et 30 000 euros selon la superficie, chez Cofisanté (enseigne Pharmarket). Chez Anton & Willem, l'une des deux enseignes d'Objectif Pharma, le ticket d'entrée est de 25 000 euros. Univers Pharmacie demande 15 000 euros, soit 240 euros par mois en leasing. Un tarif que l'enseigne Leadersanté fixe à 7 000 euros, Pharmactiv, entre 1 500 et 5 000 euros et Évolupharm à 1 000 euros, le mètre linéaire de façade. Tandis que d'autres groupements, comme D docteurs en pharmacie, appliquent un tarif variable, les pharmacies candidates à Elsie doivent impérativement enregistrer un chiffre d'affaires de plus de 5 millions d'euros et une surface minimale de 200 m2.
Autre contrepartie, le titulaire s'inscrit dans la durée : l'engagement minimum est de trois ans, chez Pharmactiv ou well&well par exemple, à cinq ans.
Contreparties
Le passage sous enseigne suppose aussi que l'adhérent monte son engagement d'un cran. Strict respect de la charte graphique, du parcours patient, du concept architectural en full concept mais aussi relais des opérations mensuelles, adoption de la carte de fidélité ou encore référencement des laboratoires partenaires, suivi de la politique d'assortiment et souvent l'imposition du LGO lui sont demandés. En outre, il n'est pas rare que soient imposées des spécificités inhérentes à l'enseigne. Ainsi chez Anton & Willem le référencement en médecine naturelle est obligatoire, positionnement oblige. Pharmactiv demande la mise en place d'au moins un corner spécialisé, MAD avec la marque maison Betterlife, santé au naturel, expertise peau… et deux rendez-vous santé par an.
En retour, les groupements apportent souvent leur soutien au candidat à l'enseigne. À l’instar de Giropharm, qui souhaite atteindre 300 pharmacies à l'enseigne dans cinq ans, en finançant 30 % du montant des travaux. « Pour aider les pharmaciens dans la prise en charge de ces investissements, nous avons créé l'Aide à la mise au concept d'enseigne (AMCE) et nous participons à hauteur de 300 euros/m2. Soit quasiment la moitié du coût moyen de l'investissement intérieur moyen », promet de son côté Giphar.
Vecteurs de croissance
Ces concepts sont porteurs de promesses. Ils misent sur la fidélisation des patients mais aussi sur la captation d'une nouvelle clientèle, via la récurrence de la signalétique et l'attachement à la marque de l'enseigne. « Le pharmacien est ambassadeur de la marque. En retour, il a la garantie que la marque apporte du flux », affirme Hervé Jouves, président du groupe LafSanté. Il en veut pour preuve « une fréquentation de 600 clients jours pour les pharmacies Lafayette contre 120 clients/jour pour une pharmacie traditionnelle ». « Sur le premier semestre 2021, nos nouveaux adhérents ont triplé leur chiffre d'affaires », assure-t-il.
Car la croissance est pour tous le Graal de la démarche : + 30 % en deux ans, annonce iPharm, + 12% de fréquentation, +16 % de Chiffre d’affaires et + 9 % sur le panier moyen hors remboursable, promet PHR tandis que Pharmodel garantit qu'en moyenne toute pharmacie passant à l'enseigne D docteurs en pharmacie voit son chiffre d’affaires en OTC/Para progresser de 12,7 % par rapport à moyenne nationale, son EBE de 16,5 %, leur marge de 15,2 % alors que son stock de parapharmacie baisse de 19,3 %. « Le passage au concept global by Médiprix permet une progression moyenne de 20 à 40 % du chiffre d'affaires, de 15 à 45 % de la fréquentation, et un taux de marge supplémentaire de 4 % », observe Jérôme Escojido, son cofondateur. Aprium constate, dans le sillage de l'enseigne, une progression de 2 à 3 points de marge additionnelle et une croissance moyenne de 20 % de la fréquentation et du chiffre d'affaires hors médicaments. Tandis que Les Pharmaciens associés observent dans les pharmacies pilotes Santalis une croissance de 11 % de chiffre d'affaires et 8 % de marge, mais aussi 42 % sur le segment des médecines douces, 21 % en dermocosmétique et 20 % en bébé.
Selon les services mis en place, le chiffre d'affaires des officines sous la bannière Pharmarket augmente de 40 000 euros à 500 000 euros, dès la première année. La première année est également marquée par une hausse de 130 000 euros du chiffre d'affaires en médecine naturelle dans les pharmacies Anton & Willem, Excel Pharma constatant 15 à 30 % de progression pendant la même période. Chez EvoluPharm, l'évolution de 7 à 14 % du chiffre d'affaires se mesure sur tous les segments de TVA dès le passage à l'enseigne.
D'autres groupements mesurent la performance sur le moyen terme. Pharmavance affirme que le savoir-faire apporte ses preuves : après 36 mois de passage à l'enseigne, le chiffre d'affaires évolue de 10 %, voire de 20 % en full concept. Rien d'étonnant à ce que ces performances concernent en majorité le hors ordonnance.Ainsi, Univers pharmacie observe durant les 4 premières années une progression moyenne de 38 % du chiffre d'affaires dont une part de 33 % en hors ordonnances. Giphar constate une hausse de 21 % de chiffre d'affaires après le passage à l'enseigne, et note que celle-ci bénéficie d'une hausse de 23 % des tickets en hors ordonnances.
Le pharmacien, variable d'ajustement
La majorité des groupements impute ces résultats à l'application stricte de la politique d'enseigne. Ils sont, d'après eux, le fruit de la stratégie du groupement dans le positionnement et les leviers de croissance. Cependant, ce serait oublier une composante essentielle, le titulaire et l'équipe officinale qui impriment indéniablement leur marque à l'officine, comme l'objectent d'autres dirigeants, rejetant le formatage imposé par l'enseigne. « En réalité, ces gains de performance sont beaucoup plus une conséquence de la prise de conscience du pharmacien de l’importance de l’image et de l’utilisation des outils marketings que du simple fait « d’habiller » sa pharmacie aux couleurs d’une enseigne », réfute Olivier Verdure, directeur marketing de Pharm&Free. Selon lui, la performance n’est donc pas le résultat d’une simple « mise à l’enseigne » mais bien de l’implication personnelle et individuelle du pharmacien et de la bonne utilisation des outils mis à sa disposition.
Ces différents leviers ne sont pas incompatibles avec les scores annoncés rétorquent les groupements dont le credo repose sur un cercle vertueux entre enseigne et affilié. Et d'assurer que bien accompagné, soutenu par son enseigne dans les différentes fonctions, achats, merchandising, voire formation et management, le titulaire va pouvoir développer de nouvelles compétences. Dans la mise en place de services aux patients à forte valeur ajoutée, par exemple. Ou encore dans l'exploitation des outils numériques et du phygital pour un meilleur suivi.
Autre facteur : l'attractivité du point de vente que rehausse l'enseigne, si tant est que l'officine est située dans un environnement concurrentiel. À titre d'exemple, les pharmacies Médiprix, reconnaissables au covering de leurs vitrines, conçues en corners et à forte connotation de naturalité, font la différence si le patient a le choix. Dotée de tous ses ingrédients, l'enseigne recèle le pouvoir de parler aux patients, de leur exprimer son identité et de leur prouver qu'elle leur correspond par ses éléments différenciants. « Dans les prochaines années, toutes les actions seront fléchées patients », croit Pierre-Alexandre Mouret, directeur opérationnel de Pharmavie.
Ce parti pris peut se traduire par le développement de services, bilans de médication, prévention, corners oncologie mais aussi par la vente de produits en vrac ou solides. « L'expérience client fait la différence », confirme Gilles Unglik, directeur général de Giropharm, s'appuyant sur l'exemple d'enseignes de parfums et de produits cosmétiques. D'où l'importance d'une cohérence totale entre la façade, la communication promotionnelle et la promesse de l'enseigne. Et bien évidemment entre les officines affiliées.
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