Les intentions étaient louables. L’article 66 de la loi de financement de la Sécurité sociale (LFSS 2019) qui limite strictement, à partir du 1er janvier 2020, le recours à la mention non-substituable (NS) pour les seules situations médicales définies par un arrêté ministériel, aurait dû provoquer une montée en puissance du générique telle que la connaissent certains voisins européens. Mais les syndicats de pharmaciens ont rapidement découvert le pot aux roses. Selon eux, loin de favoriser le générique à l’officine, cette disposition pourrait non seulement signer sa perte mais entraîner également dans sa chute, l’économie officinale.
Car, pour rester dans la course, les laboratoires fabricants de princeps auront tout intérêt à s’aligner sur le prix du générique dans une démarche assimilée à une demande de TFR. Ce scénario d'un TFR généralisé décrit par les syndicats est loin d’être irréaliste. La première mise sous TFR, celle du Glucophage (metformine), intervenue au cours de l'été, semble leur donner raison. « Je suis outré de voir la façon dont un laboratoire (Merck N.D.L.R.) peut remettre en cause la politique du générique. Et ce alors que nous dépassions un taux de substitution de 95 % ! », s’insurge Gilles Bonnefond, président de l’Union des syndicats de pharmaciens d’officine (USPO). Le cas du Glucophage ne restera pas une exception. Les syndicats en sont persuadés. Or ce précédent a tout lieu de les inquiéter. Selon Philippe Besset, président de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF), l’économie officinale doit redouter « de cette remise en scène des produits princeps dans les groupes génériques » une perte de 300 millions d’euros, dès le 1er janvier 2020.
Trois semaines pour agir
Le président de la FSPF s’en explique. L’alignement par les fabricants du prix de leur princeps sur le celui du générique provoquera un manque à gagner pour l’officine de 100 millions d’euros. Pour compléter ce scénario catastrophe, Philippe Besset estime que ce mécanisme économique aura pour autre conséquence de réduire de 20 % le marché du générique, soit une perte supplémentaire de 200 millions pour le réseau. « C’est un effondrement assuré de l’économie officinale », prédit Philippe Besset. Gilles Bonnefond, de son côté, tempère en remarquant « que, fort heureusement, la récente baisse de la marge commerciale réduit l'exposition de l'économie officinale à cette mesure ». « C'est un élément important de stabilité économique », résume le président de l'USPO. Il redoute par ailleurs que la remise en cause des règles du NS ne ravive la polémique auprès des patients « qui déjà commencent à s'inquiéter ».
Dans ces conditions, les deux syndicats sont résolus à se saisir du prochain débat sur le PLFSS 2020 pour faire entendre la voix des pharmaciens. Car le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS 2020) sera leur dernier va-tout pour « arrêter ce train qui va dans le mur », selon le président de la FSPF, qui ébauche trois solutions. « L’idéal serait d’obtenir une suppression de l'article 66, une deuxième option serait la suppression de la partie de l'article concernant la mention sur les prix, et, enfin, en dernier recours, nous pourrions obtenir un report de cette disposition de la LFSS 2019 pour étudier une autre solution », expose le président de la FSPF. Pour Gilles Bonnefond, il faudra impérativement une initiative parlementaire pour réévaluer cette mesure. En un mot, estime-t-il, il ne reste plus que trois semaines pour corriger un texte qu'il avait jugé délétère, dès sa sortie, lors du PLFSS 2019.
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