Docteur en pharmacie, fondateur-directeur du cabinet Pharmacy & Consulting et ancien directeur de la Fédération internationale pharmaceutique (FIP), Luc Besançon plébiscite l’officine promue centre de santé et de bien-être de proximité, dont le pharmacien développe des solutions pour « prévenir, guérir et aider les patients, leurs aidants et les autres soignants ». Des solutions personnalisées qu’il classe en cinq groupes.
Premier groupe : prévention et promotion de la santé. La vaccination antigrippale à l’officine, généralisée cette année en France, entre parfaitement dans cette définition. « Ce n’est qu’une première étape, avec des conditions très restrictives en termes de cible. Aux États-Unis, la moitié des États autorisent la primo-vaccination à partir de 7 ans », note Luc Besançon. Les exemples étrangers sont nombreux en termes de dépistage par les pharmaciens : risques cardiovasculaires en Angleterre, cancer du côlon en Suisse, VIH en Espagne, hépatites en Angleterre et aux États-Unis.
Relation patient
Deuxième groupe identifié par Luc Besançon : l’initiation et l’optimisation d’un traitement pour atteindre des objectifs thérapeutiques. En Suisse, le système netCare permet au pharmacien de prendre en charge des affections courtes en dispensant des médicaments ou en proposant une téléconsultation avec un médecin. « Trois jours après, le pharmacien appelle le patient pour savoir si le problème a été résolu et cette démarche change complètement sa relation avec lui. Ce programme englobe environ 25 affections bénignes. Selon les dernières données, le pharmacien a résolu le problème seul dans 76 % des cas, il a orienté vers une téléconsultation dans 17 % des cas et 7 % des patients ont eu besoin d’une consultation classique. »
Autre exemple, au Québec, où le pharmacien peut prescrire un médicament pour une condition mineure déjà diagnostiquée et traitée par le passé (cystite, herpès labial) ou lorsqu’aucun diagnostic n’est requis (prophylaxie). « On peut aussi parler des ordonnances collectives, la version québécoise de la dispensation protocolisée. Dans le cadre d’un protocole de soins avec un médecin qui définit les objectifs thérapeutiques, le pharmacien peut initier ou arrêter un traitement, ou en ajuster la dose », détaille Luc Besançon. Ou encore, « en Alberta (Canada), cela fait plus de 10 ans que les pharmaciens ont le droit de prescrire tout médicament à l’exception des stupéfiants ».
Continuité du traitement
Le troisième groupe de solutions personnalisées touche l’approvisionnement en produits de santé. C’est la synchronisation des ordonnances mise en place aux États-Unis, où le pharmacien assigne un jour du mois à ses patients chroniques stables pour renouveler leur ordonnance. « Il appelle son patient quelques jours plus tôt pour rappeler le rendez-vous, vérifier sa prescription pour pouvoir la préparer, et il peut en profiter pour proposer une action de santé publique, par exemple la vaccination contre la grippe. Cela lui permet de préparer la dispensation en amont, ce qui évite les manquants de dernière minute et facilite la gestion des stocks. » De même, au Royaume-Uni comme au Danemark, le pharmacien peut prolonger une ordonnance périmée pour des médicaments chroniques et sans risque d’addiction, afin d’assurer la continuité du traitement.
Quatrième groupe : améliorer le bon usage et l’observance. Cela passe par exemple par des démonstrations d’utilisation de médicaments à inhaler (Danemark et Belgique), mais aussi à injecter (Canada et États-Unis), et par un accompagnement spécifique lors de la première dispensation d’un traitement chronique (Danemark, Norvège, Angleterre). « Une à deux semaines plus tard, le pharmacien a un entretien de 10 à 15 minutes avec le patient pour avoir son ressenti, s’il lui arrive d’oublier son médicament, s’il a des effets indésirables, des doutes, et il met en place des solutions avec le patient pour améliorer la situation. Il recommence trois à cinq semaines plus tard », décrit Luc Besançon.
Soins coordonnés
Enfin, le cinquième groupe de solutions consiste à soutenir des soins coordonnés et de qualité au sein d’une équipe de soin. « Dans certaines provinces d’Italie, le patient peut aller à la pharmacie pour réserver des soins à domicile avec d’autres professionnels de santé. » Des pharmacies mettent à disposition des soins fournis par d’autres professionnels de santé (infirmières aux États-Unis, nutritionniste ou podologue au Portugal), d’autres sécurisent la transition des soins à l’entrée ou à la sortie de l’hôpital. Le principe des cercles de qualité qui réunissent pharmaciens et médecins autour des pratiques de prescription (Suisse, Pays-Bas) intéresse désormais la France.
Toutes ces actions placent le patient au centre du système. Si ces exemples étrangers offrent des perspectives d’évolution pour les pharmaciens français, la France n’est pas en reste et « s’inscrit dans une tendance internationale », comme le prouvent les dernières évolutions : TROD angine, télésoin, vaccination antigrippale, dispensation protocolisée, pharmacien correspondant, entretiens pharmaceutiques, bilan partagé de médication…
D'après une conférence lors du congrès Pharmacie Référence Groupe.
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