Le Quotidien du pharmacien. - En quoi consiste votre mission dans les EHPAD où vous intervenez ?
Marie-Thérèse Henry. - Je travaille pour deux EHPAD à taille humaine qui accueillent respectivement 60 et 80 résidents. En termes d'heures, cela représente un temps plein pour mon équipe mais je suis la seule à me rendre sur place. J'ai personnellement eu la chance de ne pas être confrontée à des situations dramatiques mais nous connaissions un stress permanent parce que nous n'avions aucune idée de ce qui allait arriver. Pour le premier établissement, la préparation des doses à administrer (PDA) se fait toujours en officine et nous avons maintenu ce système pendant l'épidémie. Sauf pour certains actes, comme les prises de mesure, je ne suis pas en contact direct avec les résidents. Mais j'en connais beaucoup personnellement même si l'on perd le lien que l'on avait avec eux quand ils étaient à domicile.
Estimez-vous que l'on s'est suffisamment appuyé sur vos compétences pendant la crise du Covid-19 ?
Je sors de cette période avec un sentiment de frustration quant au rôle que j'ai pu jouer. Le pharmacien qui intervient en EHPAD est davantage vu comme un fournisseur que comme un membre de l'équipe soignante. Les médecins coordinateurs nous intègrent relativement bien dans le processus mais les infirmières ont beaucoup de mal à voir ce que nous pouvons apporter, elles nous voient comme des éléments extérieurs au système. Je n'ai même pas été informée quand les résidents ont été testés pour le Covid, on ne m'a pas dit ensuite si certains d'entre eux étaient positifs. J'ai donné l'impulsion pour proposer des protocoles, sur l'hygiène notamment. J'ai été proactive, mais on ne me sollicitait pas directement. Je trouve que nos compétences ne sont pas suffisamment utilisées, le pharmacien ne fait partie de l'équipe soignante de l'EHPAD que lorsqu'il y a une nécessité. Concernant le protocole de fin de vie et l'usage du Rivotril, j'ai été prévenue après les établissements. Il aurait fallu, au minimum, que j'en sois informée en même temps qu'eux. Ce protocole, je n'ai pas même pas été en mesure de le fournir aux structures car le Rivotril n'était pas disponible… Globalement, je ressens pas mal de frustration car j'estime que j'aurais pu faire plus de choses.
Après ces mois difficiles, votre envie de vous investir est-elle plus ou moins forte qu'auparavant ?
Non, je continuerai à m'y investir autant qu'avant, par conscience professionnelle et parce que cela me tient à cœur. Même si nous ne recevons aucune rémunération pour le travail que nous faisons, même si je perds peut-être de l'argent vu le temps que j'y passe, même si l'on nous demande de faire plus que ce que l'on demande à un hôpital, et ce avec zéro moyen… J'espère que le pharmacien qui intervient en EHPAD pourra un jour être autorisé à faire plus de choses, qu'il aura une plus grande marge de manœuvre et que les pouvoirs publics nous considéreront comme une vraie pharmacie à usage intérieure (PUI) et non plus comme de simples fournisseurs…
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