L’officine a-t-elle encore la cote ? Cette question taraude la profession et reste légitime au regard des dernières statistiques que vient de présenter le Conseil national de l’Ordre des pharmaciens (CNOP). Certes, le problème de l’attractivité ne concerne pas seulement l’officine qui emploie les trois-quarts des pharmaciens. Il touche l’ensemble des métiers de la pharmacie, dont l’Ordre enregistre une baisse de 6,1 % des inscriptions (+0,53 % en 2014) et un taux d’évaporation des diplômes jamais atteint : 32,8 % des nouveaux diplômés ne se sont pas inscrits au tableau en 2015.
Mais si la désaffectation pour l’officine inquiète particulièrement le CNOP, c’est qu’elle est, au-delà du symbole, révélatrice d’un malaise. La carrière officinale ne fait plus rêver sur les bancs de la fac. Moins d’un étudiant sur trois seulement opte pour cette filière quand ils étaient encore 60 à 70 % à la choisir auparavant. Du côté des titulaires, le nombre de primo inscrits à la section A est passé de 42 en 2014 à 35 un an plus tard. Ces primo-accédants ont d’ailleurs tendance à vieillir : 17,1 % ont plus de 36 ans, contre 2,4 % en 2014.
Ressources humaines
Ces chiffres trahissent une certaine frilosité à l’heure où une pharmacie ferme désormais tous les deux jours. Sans parler de la disparition de mille officines en dix ans. Pour alarmants qu’ils soient, ces deux indicateurs ne suffisent pas à expliquer cette tendance. Car les évolutions démographiques du réseau officinal ouvrent des perspectives autrement plus prometteuses aux générations montantes. En effet, l’âge moyen du titulaire a désormais franchi la barre des 50 ans, celui de son adjoint se situe aujourd’hui à 43,6 ans. Selon les simulations de l’Ordre, en 2021, on recensera 1 929 pharmaciens d’officine (titulaires et adjoints) de plus de 65 ans supplémentaires, contre 597 aujourd’hui. C’est dire le besoin de relève. « Nous allons être confrontés à un départ massif d’ici à quelques années et de réels problèmes de ressources humaines se posent d’ores et déjà à la profession », s’inquiète Isabelle Adenot, présidente du CNOP.
Un exercice groupé
L’enjeu est aujourd’hui de rendre attractif l’exercice officinal. La première mission consiste sans doute à tordre le cou à certaines idées reçues. Ce à quoi s’emploient les statistiques de l’Ordre. En dépit d’une concentration croissante du réseau et de 181 nouvelles fermetures en 2015, la proximité reste garantie aux patients sur un réseau demeurant harmonieux.
Deuxième préjugé démonté par l’Ordre : les jeunes titulaires ne fuient pas la ruralité, bien au contraire. Tournant le dos à certains arrondissements parisiens, ils préfèrent s’installer en région avec une prédilection pour la moitié Nord de la France : Ouest normand, Picardie et Grand Est.
Ils y trouvent un réseau consolidé en dépit de nombreux mouvements (transferts, regroupements et fermetures). L’Ordre voit d’ailleurs dans les 38 regroupements opérés en 2015 la preuve d’une restructuration, plus ou moins volontaire du réseau. Et si 143 restitutions de licences démontrent que de nombreux titulaires n’ont pas trouvé de repreneurs, il est faux de penser que ces fermetures ne touchent que les petites officines. Car un tiers des restitutions de licences seulement sont le fait de pharmacies au chiffre d’affaires (CA) annuel inférieur à 500 000 euros. Un autre tiers concerne la tranche de CA situé entre 500 000 et 1 million d’euros, tandis que le dernier tiers des fermetures frappe les pharmacies entre 1 et 2 millions d’euros de CA.
Enfin, aux jeunes qui craignent d’être isolés, la profession exercée jusque-là en solitaire, montre un nouveau visage. Celui de l’exercice groupé. En dix ans, le nombre de SEL (société d’exercice libéral) a été multiplié par six. Et les SPFPL (société de participation financière de profession libérale) sont six fois plus nombreuses aujourd’hui qu’il y a deux ans. « Nous constatons une entraide intergénérationnelle, les titulaires aidant les jeunes à s’installer », se félicite Isabelle Adenot. Reste que pour être parfaitement attractive, l’officine doit donner aux jeunes les moyens de se projeter dans un modèle économique plus sécurisant et dans un cadre réglementaire mieux défini. Deux conditions qui sont loin d’être remplies.
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