Un flou juridique persiste autour du droit à administrer un médicament à un enfant dans un établissement d'accueil dédié, comme les crèches. Des associations et sociétés savantes réclament une prise de position ferme.
Peut-on administrer un médicament en établissement d'accueil du jeune enfant (EAJE) ? Cette question n'est pas clairement tranchée et pose souvent problème. Un problème qui s'est récemment cristallisé autour du cas de Rose, exclue à 22 mois d'une crèche pour cause d'épilepsie. En février 2016, la nouvelle directrice de la crèche a estimé ne pas être en mesure de faire face à une éventuelle crise de convulsions, faute de personnel qualifié sur place. Les parents ont porté plainte, soutenus par l'association Épilepsie-France. Mais, le 17 mai 2019, la Cour d'appel a donné raison à la crèche : seules les professions médicales peuvent administrer un médicament.
Dans les faits, l'interprétation des textes n'est pas la même partout. Dans une lettre ouverte à la ministre de la Santé datée du 10 avril dernier, neuf associations et sociétés savantes exigent une clarification sur cette question. Le collectif souligne que de nombreux établissements accueillent des enfants ayant une pathologie chronique « dans le cadre de protocoles bien définis », avec la « bonne volonté » des équipes. Cependant, d'autres « se retranchent derrière l'absence de personnel médical » pour refuser des enfants. Le jugement du cas de Rose a laissé les associations perplexes. « Un enfant allergique peut se voir administrer une injection d'adrénaline en cas de crise d'allergie par n'importe quel personnel ayant signé le projet d'accueil individualisé (PAI), et un enfant épileptique ne pourrait pas avoir une dosette de médicament qui stoppe la crise d'épilepsie sans présence de personnel médical ? », interroge Delphine Dannecker, présidente d'Épilepsie-France.
Cette jurisprudence pourrait effrayer les professionnels de la petite enfance. Ainsi, à Toulouse, la section CGT des services publics municipaux les appelle, via un tract, à « refuser d'administrer des médicaments quels qu'ils soient » sous peine de « sanctions pénales pour exercice illégal de la médecine » et de perdre leur diplôme. Pour la Fédération française des entreprises de crèches (FFEC), il n'est pas juste de « mettre des salariés dans une situation où ils ont peur de faire leur métier ». Elle indique qu'à ce jour, « aucune poursuite ou condamnation » pour exercice illégal de la médecine n'a été recensée, et appelle aussi à une clarification des règles pour garantir l'accueil de tous les enfants.
Selon une réponse ministérielle à une question écrite publiée au « Journal officiel » le 21 novembre 2018, cette problématique doit faire l’objet d’une réflexion dans le cadre de l’adoption d’ordonnances dans le domaine de la petite enfance, courant 2019.
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