Quelle doit être, selon vous, la place du pharmacien dans le système de santé français ?
Les pharmaciens occupent une place centrale dans notre système de santé. Ils sont souvent les premiers interlocuteurs des patients, ceux qui vont les orienter, poser un premier mot sur leurs symptômes. Aujourd’hui, le rôle des pharmaciens est de plus en plus polyvalent et la diversification de leurs missions vient utilement compléter les dispositifs de prise en charge des patients, notamment dans le cadre du suivi de l’observance de leurs traitements.
Êtes-vous favorable au maintien du monopole de la vente des médicaments en pharmacie d’officine ?
Je suis favorable au maintien du monopole de la vente des médicaments en pharmacie d’officine. Il ne faudrait pas que la commercialisation de médicaments en grande surface conduise les Français à consommer plus de médicaments. Ce n’est pas parce que des voix nous disent que des pharmaciens pourraient être présents sur place qu’ils auraient effectivement la possibilité d’exercer leur art en toute indépendance, sans prendre en compte les objectifs de vente affichés par les grands groupes. Il faut savoir résister à l’extension infinie du domaine du marché, qui plus est lorsque cela touche à des domaines sensibles comme celui de la santé. Vivre en bonne santé est un droit qui doit être assuré par la puissance publique. Le médicament, comme la santé, n'est pas une marchandise, son prix ne peut pas être fixé par le jeu de l’offre et de la demande, sa délivrance doit demeurer strictement encadrée au nom de la santé publique et du maillage territorial.
Êtes-vous favorable à l’ouverture du capital des officines à des investisseurs non-pharmaciens, autrement dit, à la création de chaînes de pharmacies ?
Je ne crois pas que cette perspective soit souhaitable car elle est susceptible de remettre en cause l’indépendance du pharmacien. Cette possibilité a été donnée au Québec qui est en train de faire marche arrière. Mes équipes se sont entretenues avec le ministre de la Santé, Gaétan Barrette, qui nous a alertés sur les dérives potentielles de cette politique. Le risque, c’est le contrôle par de grands groupes des officines les plus rentables au détriment des petites officines dont la présence sur tous les territoires est aujourd’hui indispensable.
Pourquoi jugez-vous nécessaire de dispenser les médicaments à l’unité ?
Cela fait plusieurs années que je suis favorable à la dispensation à l'unité des médicaments, c’est une nécessité pour lutter contre le gaspillage. Mais une vraie réflexion, que j’engagerai avec la profession, est indispensable pour que ce ne soit pas une fausse « bonne idée ». Tant que le modèle industriel ne sera pas adapté, la délivrance à l’unité sera un échec. Aujourd’hui, nous attendons toujours le rapport sur l’expérimentation menée dans une centaine d’officines sur les antibiotiques vendus à l’unité. Mais à mon sens, la délivrance à l’unité n’est pas opportune dans le cadre des maladies chroniques.
Quelle sera votre politique du médicament ?
Les médicaments innovants sont une formidable chance pour les malades et leurs familles. Ils promettent de soigner des pathologies autrefois incurables. Je refuse cependant le présupposé qui voudrait que la France soit obligée d’accepter les prix scandaleux demandés par certains industriels : 41 000 euros alors que le coût de production est estimé à une centaine d’euros, c’est inacceptable. Obtenir des baisses de prix est impératif. Pour cela, je souhaite une plus grande transparence des négociations. Il faut aussi renforcer les moyens des agences qui évaluent l’efficacité des médicaments. Si jamais certains laboratoires refusent d’entendre raison, je n’exclus pas de recourir à la licence d’office, possibilité qui est donnée à l’État de rendre générique immédiatement un médicament que nous jugeons indispensable pour la santé des Français.
La taxe robot s’appliquera-t-elle aux automates qui équipent certaines pharmacies ?
La mise en œuvre de la taxe robot nécessitera une concertation avec l’ensemble des secteurs avant son entrée en vigueur. Il faudra étudier attentivement l’ensemble.
Vous souhaitez renforcer dépistage et vaccination. Êtes-vous favorable à la vaccination contre la grippe en pharmacie ?
Oui, sans aucune réserve. Ce sera déjà possible en expérimentation dans certaines régions pour la vaccination antigrippale des adultes dès l’hiver 2018. Si elle est probante, il serait possible de l’étendre à d’autres vaccinations, dans un cadre évidemment bien réglementé. Il ne s’agit pas de mettre en concurrence les professionnels de santé mais bien d’augmenter la couverture vaccinale.
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