L'économie officinale vue par Fiducial

Les derniers chiffres d'avant l'accident

Par
Publié le 04/09/2020
Article réservé aux abonnés
L’étude 2019 publiée cet été par Fiducial atteste d’une relative stabilité des chiffres, voire émet quelques signaux encourageants. N’en reste pas moins en suspens la question de la capacité de l’économie officinale à résister au choc de la crise sanitaire.

Aucun économiste, ni aucun financier n’aurait pu imaginer un tel « crash test », opération destinée à tester le comportement de l’économie officinale en cas de choc imprévisible comme une chute d’activité brutale, la fermeture de cabinets médicaux ou encore l’exode d’une partie de la clientèle, autant d’aléas survenus pendant la pandémie. Aussi ne reste-t-il pour l’heure, comme seule grille de lecture, les chiffres – plutôt rassurants — publiés par Fiducial au cours de l’été et qui portent sur l’année 2019 (1).

Cet exercice 2019 a vu progresser certains indicateurs tandis que la marge brute en valeur absolue performe mieux qu’en 2018. De manière générale, il s’est agi d’une année relativement étale au cours de laquelle la part du médicament remboursable a gagné 0,25 point pour constituer 75,4 % d’un chiffre d’affaires en hausse de 2,08 % à 1,607 million d’euros. Mais encore faut-il relativiser puisque sur les 498 bilans étudiés par Fiducial (2), plus d’un tiers des officines ont vu leur chiffre d’affaires baisser. Pour les autres, le tableau reste contrasté entre les pharmacies de centre commercial qui profitent d’une hausse d’activité de 3,57 % alors que leurs homologues de centre-ville et de zone rurale ne bénéficient que d’une augmentation respective de 2,23 et 1,71 %. L’analyse Fiducial relativise par ailleurs en insistant sur la part des médicaments chers dans ces performances. Elle invite plutôt à observer d’autres indicateurs tels la marge brute qui s’est améliorée de 1,22 % entre 2018 et 2019 à 498 000 euros en moyenne, ou encore l’excédent brut d’exploitation (EBE) qui équivaut à 12,22 % du chiffre d’affaires contre 12,27 % en 2018. Rapporté à une activité en légère augmentation, ce montant avant rémunération et cotisation TNS atteint en moyenne 232 111 euros, soit environ le niveau d’une pharmacie rurale, 217 889 euros pour une pharmacie de centre-ville et 319 914 euros pour une officine de centre commercial.

Si les salariés ont amélioré leur productivité de 4,17 % en dépit d’une baisse des effectifs (4,6 salariés par officine contre 4,7 un an auparavant), ces efforts sont partiellement gommés par une hausse importante des charges externes qui constituent 5,58 % du chiffre d’affaires contre 5,40 % en 2018, ce phénomène est essentiellement dû à la hausse des loyers. Dans ce contexte, le titulaire se rémunère moins que l’année précédente : 56 518 euros contre 57 725 euros en 2018. Ce signal est d’autant plus important que 68,75 % des titulaires touchent moins que cette moyenne. Ils n’étaient que 64 % en 2018. Ces titulaires fourmis n’en nourrissent pas moins des projets pour leur officine puisque dans 65,46 % (62,43 % en 2018) des cas, ils ont décidé d’investir pour un montant moyen de 19 212 euros (17 893 euros). 3,41 % se sont même lancés dans des grosses rénovations pour des investissements supérieurs à 100 000 euros.

Des fondations consolidées

Le Covid sera-t-il parvenu à entamer cette confiance en l’avenir ? L’étude ne permet pas de le dire. Les analystes se sont en revanche penchés sur trois indicateurs permettant d’évaluer la capacité de la trésorerie d’une officine à faire rapidement face à ses engagements financiers. Le risque de liquidité générale est quasiment exclu, sinon maîtrisé, sur l’ensemble des officines étudiées. En ce qui concerne le risque de liquidité restreinte, en revanche, les officines de centre-ville et celles des quartiers semblent plus vulnérables. À l’inverse, leurs homologues de centre commercial se trouvent plus exposées au risque de liquidité immédiate. Au final, si les pharmacies témoignent dans leur ensemble d’une robustesse financière certaine, celles situées en zone rurale apparaissent comme les plus résistantes.

Les enseignements tirés de l’épisode Covid seront lourds de sens. Car comme le souligne Christian Latouche, président de Fiducial, « la vraie question à poser est la capacité de résilience des pharmacies face à une crise sanitaire sans précédent ». Il rappelle que le modèle économique « s'est au travers des nombreuses années de disette trouvé renforcé ». « La rigueur de gestion et la volonté de la profession à mieux interpréter l’avenir ont sans aucun doute contribué à consolider les fondations », analyse-t-il. Les indicateurs sont donc à surveiller de près.

(1) « Le cahier Fiducial du pharmacien 2020 »
(2) Dont 76,10 % en mode d’exercice individuel, 26,90 % ont un chiffre d'affaires entre 1,050 et 1,50 million d'euros et 43 % implantées en zone rurale.

Marie Bonte

Source : Le Quotidien du Pharmacien