Des chiffres qui vont donner du grain à moudre aux négociateurs – syndicat et assurance-maladie- de la convention pharmaceutique. Et alimenter les polémiques. Car le constat est clair. Les baisses de prix ne se poursuivent pas seulement. Elles s’accentuent. Au point de surpasser les objectifs fixés dans la Loi de financement de la Sécurité sociale (LFSS) pour 2024.
C’est en tout cas ce qui risque de se produire si les dévaluations tarifaires constatées entre le 1er janvier et le 25 mars continuent sur leur lancée, analyse Patrick Oscar, délégué général du GIE Gers. Les statistiques, présentées le 4 avril lors du 32e atelier du GIE, sont sans appel : les avis de baisses de prix ont atteint un niveau record pendant cette période au travers de multiples salves au « Journal officiel » qui ont porté sur pas moins de 718 spécialités. Soit deux fois plus qu’un an auparavant. « L’objectif des pouvoirs publics aura-t-il été de frapper fort dès le début d’année afin d’engranger le maximum d’économies ? » , interroge le délégué général du GIE Gers.
Les médicaments chers, plus gros contributeurs
Toujours est-il qu’en fin d’année les économies réalisées en ville et l’hôpital atteindront près d’un milliard d’euros (prix net) (1,115 milliard d’euros en prix brut) et qu’elles surpasseront largement l’objectif fixé à 850 millions d’euros (en prix net) par la LFSS 2024. « Et ceci sans tenir compte des futures baisses de prix qui seront publiées au « Journal officiel » d’ici à la fin de l’année », précise Patrick Oscar. Il indique ainsi que 136 millions d’euros d’économies ont déjà été engrangés par les baisses de prix en ville au cours de la période. Compte tenu des baisses annoncées, soit 563 millions d’euros, on doit s’attendre à un rendement prévisionnel de 699 millions d’euros sur l’ensemble de l’année, projette le Gers Data*. Aucune surprise ces baisses de prix frappent en priorité les médicaments dont le prix excède 500 euros. Cette catégorie est le plus gros contributeur aux économies. 253 de ces spécialités ont été soumises à une baisse de leur prix depuis le début de l’année. À l’inverse, les spécialités dont le prix ne dépasse pas cinq euros ont été plus nombreuses à subir le tour de vis des pouvoirs publics, mais cette catégorie – la troisième la plus impactée — ne représente que 2,3 % du montant des baisses de prix. « Le phénomène mérite d’être observé dans sa globalité au cours des prochains mois », enjoint Gers Data.
11 % de hausse pour les médicaments chers
Autre indicateur qui sera suivi de près dans les négociations conventionnelles, l’évolution du poids dans l’économie officinale des médicaments chers – prix supérieur ou égal à 1930 euros —. À nouveau les chiffres parlent. Selon les données Gers Data, entre 2019 et 2023, le nombre de ces présentations a été multiplié par 1,8, le chiffre d’affaires réalisé par ces délivrances par 2,3. Aussi, le léger retrait observé en début d’année dans la part que ces produits détiennent au sein des ventes de médicaments remboursés (PMO) à l’officine reste anecdotique. Ils ne représentent certes « plus que » 23,4 % du chiffre d’affaires PMO, contre 23, 5 %, pour la période de référence de 2023. « Ce recul s’explique par une baisse de prix en début d’année sur certains de ces médicaments », précise Patrick Oscar. Toutefois, le chiffre d’affaires de ces médicaments dits onéreux a augmenté de 11 % au cours de deux premiers mois de l’année, par rapport à la période de référence 2023, contribuant pour 966 millions d’euros à l’activité du réseau officinal.
Un Top 5 constant
Le médicament remboursable, dans sa globalité, suit une courbe similaire au cours des deux premiers mois de l’année, se maintenant à une croissance de 10 % en janvier et même de 11 % en février. Cette dynamique est portée pour 190 millions d’euros par 5 classes de médicaments qui caracolent désormais en tête de manière constante. Sont ainsi contributeurs de croissance, les inhibiteurs d’interleukine dont les ventes bondissent de 33 %, les antinéoplasiques inhibiteurs de protéine kinase qui bénéficient d’une croissance de 15 %, les autres traitements du système nerveux central également en hausse de 33 %, les antagonistes d’hormones cytostatiques (+ 20 %) eux aussi en sortie hospitalière mais surtout les antidiabétiques inhibiteurs des SGLT2 qui grimpent de 89 %.
Extensions d’indications et sorties hospitalières sont pour bon nombre de ces produits les principaux facteurs de leur évolution à l’officine.
*Projections à volumes constants
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