Le Quotidien du pharmacien.- Pourquoi ce succès des approches de santé non conventionnelles ?
Dr de Bremond d’Ars.- Plusieurs éléments peuvent pousser des individus à se tourner vers des pratiques non conventionnelles. D’abord, la question du sens de la maladie (« pourquoi moi ? ») : la médecine ne pouvant fournir que des explications partielles, prudentes, multimodales, fondées sur des données évolutives, la tentation est grande de chercher ailleurs les réponses attendues. L’état du système de santé joue aussi : alors que les pathologies chroniques et complexes se multiplient, les soignants ne sont plus assez nombreux, et n'ont pas toujours le temps de répondre à un besoin de disponibilité, d'écoute et d'échange. De plus, une culture incitant les personnes à « réaliser leur plein potentiel » et atteindre « la meilleure version d’eux-mêmes » véhiculée par la publicité et les réseaux sociaux peut pousser des sujets, pourtant en bonne santé, à ressentir un manque, à souffrir d’un état de bien-être pas tout à fait complet, et ainsi à consulter des coachs alternatifs.
Quels sont exactement les risques des médecines non conventionnelles ?
Les premiers concernent une perte de temps et d’argent – les ménages qui recourent aux soins non conventionnels y dépensant en moyenne plusieurs centaines d’euros par an, selon un sondage de l'Union nationale des associations de défense des familles et de l'individu victimes de sectes (UNADFI). Il existe par ailleurs un risque bien réel de dérives thérapeutiques menant à des arrêts de traitements et ayant déjà occasionné des décès. Enfin, la Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (Miviludes) est en alerte sur un risque de dérives sectaires. Parmi les approches particulièrement à risque actuellement à la mode on retrouve certains jeûnes ou pratiques issues du yoga.
Quels signes de dérives doivent alerter au comptoir ?
Le détournement des patients se fait par un glissement très progressif et pernicieux, difficile à repérer. Cela étant dit, l’évocation par un patient d’une relation d’emprise (avec par exemple chantage d’un professionnel : « si vous continuez votre traitement conventionnel, je cesserai de vous suivre »), un isolement progressif, des discours de plus en plus radicaux (comme une opposition aux vaccins de plus en plus violente) et surtout un abandon de traitement, voire le fait de perdre de vue un patient, peuvent faire suspecter une dérive et doivent alerter. Dans ce genre de situations, on peut tenter de discuter avec le patient concerné – si possible – et écrire au prescripteur habituel : renforcer les liens entre professionnels de santé permettra de mieux résister ensemble aux crises à venir.
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