Une pharmacie qui ne délivre pas de médicament. Telle est la triste réalité à laquelle est confronté le titulaire d'une officine de Nexon, petite commune de 2 400 âmes située au cœur de la Haute-Vienne. Stéphane Labarre, son titulaire, s'est en effet vu retirer la licence d'exploitation de son officine à la fin du mois d'octobre. « Depuis une semaine, je ne délivre plus que de la parapharmacie à mes clients », explique-t-il un brin désabusé au « Quotidien ». Des clients qui se font naturellement plus rares. Selon le titulaire, la fréquentation de la pharmacie n'est plus que le tiers de ce qu'elle était avant la perte de licence. « Les gens viennent surtout pour me témoigner leur soutien et signer la pétition que j'ai posée sur mon comptoir. »
Cette situation, hors normes, est le terme d'un feuilleton juridique à multiples rebondissements, explique en substance Me Nicolas Chaigneau qui défend les intérêts du titulaire et rappelle la chronologie des faits : le titulaire avait demandé en 2012 le transfert de son officine du centre-ville de Nexon vers une zone commerciale située à 1,8 km de son emplacement d'origine. Demande une première fois rejetée par le tribunal administratif (TA) de Limoges. Une nouvelle demande est déposée, et cette fois-ci validée le 9 décembre 2014 par un arrêté ministériel qui autorise le transfert, notamment aux motifs que « la population résidente du quartier d'origine, situé dans la partie nord de la commune, restera approvisionnée en médicaments par la deuxième officine de la commune à 30 mètres de l'emplacement d'origine de la pharmacie de M. Labarre (...), et que M. Labarre propose de déplacer son officine de 1,8 km vers la partie sud de la commune, ce qui permettra une répartition géographique plus équilibrée des deux officines sur le territoire et optimisera la desserte pharmaceutique pour la population des hameaux situés au sud (...) »
Huit titulaires contestent le transfert
En décembre 2015, la pharmacie Labarre inaugure ses nouveaux locaux, proches du Super U et développe son offre de services, notamment connectés, sous la bannière de l'enseigne Pharmacie Référence. Mais la toute nouvelle vitrine ne plaît pas à tout le monde… Huit pharmaciens du secteur contestent en effet la décision ministérielle. Ils déposent un recours en annulation devant le TA de Limoges… et remportent cette troisième manche à la fin du mois de septembre 2017. Le transfert est annulé par le TA qui juge alors que la pharmacie ne peut être ouverte à cet endroit car « il n'y a pas de population suffisante ».
Me Chaigneau et son client décident alors une contre-attaque en trois temps : déposer un nouveau recours auprès de la Cour d'appel administrative de Bordeaux, saisir cette même cour en référé pour demander la suspension de l'exécution du jugement du TA de Limoges, et enfin redéposer une demande de transfert. « Sur ce dernier point, précise l'avocat, je compte fermement sur le fait que, dans les 4 mois, la nouvelle ordonnance réformera le Code de la santé publique sur cette question des transferts. »
Nous nous garderons bien de tout jugement sur le bien-fondé de ces procédures en chaîne. Mais il y a fort à parier que pendant que Stéphane Labarre espère une issue rapide, notamment par une décision en référé qui pourrait intervenir dans les 15 jours, d'autres pharmaciens doivent croiser les doigts pour que cela n'arrive pas…
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