JEUDI dernier, des huissiers frappent à la porte du groupe PHR, à Boulogne-Billancourt (Hauts-de-Seine) armés d’une ordonnance sur requête. Une perquisition en bonne et due forme commence. Le but : photographier l’ensemble de la publicité en faveur du groupe PHR et de ses marques, réunir tout exemplaire ou support de publicité en sa faveur, tout document sur les conditions de mise en œuvre de la publicité, toute pièce liée au club Pharmadys* et aux offres spéciales proposées aux patients. Dans le même temps, deux pharmacies parisiennes adhérentes, l’une sous l’enseigne Viadys, l’autre sous Pharmaréférence, sont également perquisitionnées, ainsi que le cabinet Publicis Consultants, qui a conçu la campagne de communication. Dès le lendemain, le groupe PHR reçoit une assignation à comparaître devant le tribunal de grande instance (TGI). « Nous avons 15 jours pour comparaître, préparer notre défense, prendre connaissance des accusations, etc. Je m’attendais à une réaction de l’Ordre, mais je l’imaginais plus confraternelle », indique Lucien Bennatan, président du groupe PHR.
En avril, ce dernier avait transmis à l’Ordre une proposition de Charte pour la communication des officines ; il s’imaginait recevoir une réponse, des amendements, une invitation à débattre… « Finalement, on se dirige vers une longue bataille juridique. » Pomme de discorde : sa campagne de communication lancée en mars dernier et diffusée à la radio, dans la presse, sur Internet et par voie d’affichage, autour du slogan « Vous donner toutes les raisons de nous préférer ».
Indignation.
« Cette procédure est la même que pour Giphar, il s’agit bien d’une assignation au tribunal. La différence est dans la requête déposée auprès du président du TGI de Paris qui permet, lorsqu’elle est acceptée, de diligenter un huissier pour réunir des documents qui viendront étayer l’assignation présentée. Nous avions besoin d’éléments de preuve », explique Isabelle Adenot, présidente du conseil national de l’Ordre des pharmaciens (CNOP). Pour l’instance professionnelle, il ne s’agit pas d’empêcher toute communication. « L’assignation porte sur l’interdiction pour un groupe de pharmacies de faire de la publicité pour ses propres pharmaciens. On peut, en revanche, promouvoir les missions des pharmaciens dans leur ensemble. »
L’Ordre craint en effet l’escalade : un groupe A affirme que ses officinaux sont les meilleurs, un groupe B soutient que ce sont les siens les meilleurs, etc. « On ne peut défendre tout et son contraire. Si nous défendons notre maillage territorial, il n’est pas possible de promouvoir un nombre limité de pharmaciens. Ce type de publicité a soulevé l’indignation d’une partie de la profession puisque des confrères se sont manifestés à ce sujet auprès de l’Ordre. »
100 000 euros de dommages-intérêts.
Pour Lucien Bennatan, la concurrence entre pharmacies étant une réalité, la promotion de certaines pharmacies ne pose pas de problème. De même, concernant l’illégalité des offres spéciales aux patients et de la carte de fidélité, il rappelle qu’il existe de nombreuses cartes associées aux marques vendues en officine.
L’Ordre des pharmaciens répond par les préceptes énoncés dans le code de la santé publique : interdiction à un groupement ou groupe de pharmacies de faire de la publicité en sa faveur ou en faveur de ses officines, interdiction pour tout pharmacien de solliciter des commandes auprès du public (par des primes, avantages matériels, moyens de fidélisation pour une officine donnée), interdiction de publicité trompeuse et de dénigrement. C’est pourquoi le CNOP demande le versement de 100 000 euros de dommages-intérêts et la mise en place d’une astreinte de 1 000 euros par jour et par infraction afin de « faire cesser la publicité ».
La présidente de l’Ordre souhaite mettre les choses à plat. Elle entend réunir les différents acteurs de l’officine à l’automne pour aborder le sujet de la communication des pharmaciens. La méthode n’est pas la plus douce, mais une chose est sûre, le débat est lancé.
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