Le Sénat se prépare à débattre d’une proposition de loi visant à assouplir les conditions d’ouverture des pharmacies en zones rurales. Auditionnés le 21 avril, l’Ordre et les syndicats représentatifs de la profession ont partagé leurs craintes sur la mise en place d’une telle mesure.
L’idée part d’une bonne intention : préserver l’accès aux pharmacies dans les communes rurales. Les sénatrices Maryse Carrère (Hautes-Pyrénées) et Guylène Pantel (Lozère) – Groupe du rassemblement démocratique et social européen – ont déposé le 22 février une proposition de loi (PPL) visant à « assouplir les conditions d'ouverture des officines dans les petites communes afin de lutter contre les déserts pharmaceutiques », indiquent-elles dans l’exposé des motifs. Aujourd’hui, dans les territoires fragiles, une pharmacie pourrait s’installer dans une commune de moins de 2 500 habitants lorsque les communes contiguës sont dépourvues d'officine, à condition que le nombre total d'habitants des communes regroupées dépasse le seuil de 2 500 habitants et que l’une de ces communes recense au moins 2 000 habitants. La PPL vise à « appliquer cette mesure à la France entière tout en retirant le critère de plus de 2 000 habitants dans l’une des communes regroupées », résume l’Ordre des pharmaciens, qui a été auditionné le 21 mars au Sénat.
Pour l’Ordre, l'objectif est « de maintenir un maillage pharmaceutique de qualité dans ces territoires ». Or « la mesure proposée risque de déstabiliser ce maillage ». Même avis du côté des syndicats, auditionnés le même jour. « L’installation d’une nouvelle pharmacie dans un territoire fragile va gêner la pharmacie d’à côté », explique Pierre-Olivier Variot, président de l’Union des syndicats de pharmaciens d’officine (USPO). En clair, la pharmacie implantée risque de prendre une partie de la patientèle de la pharmacie la plus proche, elle aussi en zone à faible densité démographique. « Créer des officines est une façon de voir le problème, les maintenir est une autre façon de voir, ajoute Philippe Besset, président de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF). Actuellement nous avons plus une problématique de maintenir le réseau dans le temps et d’avoir une attractivité pour que les officines puissent trouver un repreneur, que d’en créer des nouvelles ailleurs. » « Cette proposition de loi pose la bonne question mais n’apporte pas la bonne réponse, résume finalement Pierre-Olivier Variot. Il faut faire en sorte que les pharmacies des territoires soient autonomes et viables. »
La bonne réponse se trouve peut-être vers des outils déjà existants. « Plutôt qu’une évolution des critères au niveau national, l’Ordre privilégie des dispositifs plus ciblés sur des zones rencontrant des difficultés d’accès au médicament, tels que les antennes de pharmacie ou encore la mesure “territoires fragiles” », préconise l’Ordre à l’issue de son audition. Inscrites dans la loi ou en expérimentation, les annexes de pharmacies sont en marche, et le décret sur les territoires fragiles est toujours en travaux. « Il tarde à paraître justement à cause de l’instabilité législative », remarque Philippe Besset, qui demande aux sénateurs du temps.
La proposition de loi sera examinée le 11 avril en séance publique au Sénat.
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