Les maladies cardiovasculaires constituent la première cause de mortalité des femmes en 41France. Selon la Haute Autorité de santé, tous les contraceptifs estroprogestatifs oraux (COCP) entraînent une augmentation du risque d'événements thromboemboliques veineux, d'infarctus du myocarde et d'accidents vasculaires cérébraux. Face à ce risque médicolégal, certains prescripteurs prennent un excès de précautions et ne proposent plus ce type de contraception alors que les femmes pourraient parfaitement y avoir recours.
Il faut bien identifier les facteurs de risques cardiovasculaires irréversibles, acquis personnellement ou résultant d'antécédents familiaux.
La persistance d'idées reçues liées à l'utilisation des COCP (prise de poids, cancer du sein, baisse de libido), la méfiance des jeunes générations vis-à-vis des hormones et leur préférence pour des méthodes plus naturelles pour des raisons écologiques, constituent aussi des freins à leur prescription. L'objectif de l'enquête Eligyn* est de faire le point sur les données actuelles de la science, et les réels facteurs de risques cardiovasculaires (FDRCV) et contre-indications à la prise d'une contraception hormonale orale. C'est aussi une façon de faire du dépistage et de la prévention car il faut bien distinguer les FDRCV irréversibles, acquis personnellement ou résultant d'antécédents familiaux, et ceux qui sont prévisibles, évitables ou modifiables. « Avant toute prescription, le médecin doit s'informer de l'âge de la patiente (plus ou moins de 35 ans), rechercher la présence de tabagisme, de diabète, de cholestérol, de migraine, ainsi que des maladies rénales et inflammatoires chroniques. Les antécédents familiaux sont assez souvent oubliés dans les entretiens préalables, souligne le Pr Jacques Blacher, service de cardiologie à l'Hôtel-Dieu à Paris. De même il ne faut pas négliger certains événements féminins spécifiques au moment de la ménopause ou de la grossesse, ainsi une femme enceinte victime de désordres hypertensifs passagers peut en porter le poids toute sa vie. » La sédentarité, l'alimentation, le stress chronique sont aussi des facteurs à prendre en compte d'autant plus qu'ils sont faciles à corriger.
Sensibiliser les médecins et les patientes
Il existe une synergie des FDRCV et ils peuvent devenir des contre-indications lorsqu'ils sont associés. « Une femme migraineuse augmente son risque cardiovasculaire si, en plus, elle fume. En revanche, un surpoids ou une obésité sans autre FDRCV associé ne représente pas une contre-indication, on ne peut pas priver de COCP toutes les femmes qui ont un IMC supérieur à 25, observe la Dr Nathalie Maitrot-Mantelet, hôpital Cochin-PortRoyal à Paris. Mais s'il est regrettable que des femmes éligibles sans aucun FDRCV artériel ou veineux (62 %) ne bénéficient pas d'une contraception orale, il est très préoccupant de constater que des femmes ayant des contre-indications théoriques prennent quand même des estroprogestatifs », observe la gynécologue.
Les résultats de l'enquête montrent que 38 % des femmes interrogées ont des FDRCV rendant impossible la prescription d'un contraceptif estroprogestatif. Parmi elles, 29 % sont concernées par une ou plusieurs contre-indications, les 10 % restants ayant deux facteurs de risque ou plus. Ce sont les FDRCV basés sur le critère de l'âge qui progresse le plus : de 30 % pour les moins de 35 ans à 44 % pour les 35-40 ans.
Le professionnel de santé ne doit pas hésiter à réévaluer la balance bénéfice/risque lors des renouvellements
Prendre le temps de l’anamnèse
L'enquête Eligyn contribue à mieux identifier les femmes réellement à risque cardiovasculaire afin que les prescripteurs puissent mieux les dépister et prescrire des COCP en toute sécurité, sans omettre les femmes éligibles à ces contraceptifs. Il est important de sensibiliser les médecins et les femmes car près de 2 femmes sur 5 sous contraception déclarent n'avoir jamais reçu d'informations sur les FDRCV de la part de leur médecin. « Le professionnel de santé doit prendre le temps nécessaire lors de la première consultation pour procéder à un interrogatoire et à un examen clinique détaillés de la patiente lui permettant d'évaluer la balance efficacité/sécurité/tolérance et ne pas hésiter à réévaluer la balance bénéfice/risque lors des renouvellements », insiste la Pr Lorraine Chabbert-Buffet, gynécologue à l’hôpital Tenon Paris.
D'après une conférence de presse de Gedeon Richter
* Enquête menée en ligne du 14 au 16 novembre 2022 auprès de 2 200 femmes âgées de 16 à 50 ans
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