Selon les récentes déclarations du ministre de l'Économie, Bruno Le Maire, l'inflation va rester élevée et aucune baisse des prix n'est en vue avant la fin 2023. Comment, dans ce cas, composer avec une inflation qui atteint 5,2 % en mai ? Faut-il reporter cette hausse des prix sur le client final ? Nicolas Bouzou, économiste et directeur du cabinet Asterès, livre quelques pistes pour affronter cette nouvelle donne économique.
Comment sortir par le haut face à cette inflation qui plombe l'activité après deux ans de pandémie ? « Une inflation qu'on pensait avoir oubliée et qui nous ramène dans les années 1970-1980 », constate Nicolas Bouzou, s'amusant des discours d'hier des économistes. « Ces quinze ou vingt dernières années, la grande question était de savoir si l'inflation était à 1 point, un demi-point ou 0. Aujourd'hui, on table sur 5 %, 6 %, voire 10 % pour certains ! », remarque-t-il. À tel point que cette hausse des prix menace sérieusement les équilibres sociaux, provoquant des revendications sur de nécessaires revalorisations des salaires et des pensions.
Sourds aux alertes, les pays européens semblent aujourd'hui découvrir l'ampleur du phénomène. Pourtant, rappelle Nicolas Bouzou, les conditions étaient réunies pour créer l'inflation. La première, cite l'économiste, est la disponibilité de liquidités abondantes. Ce critère correspond exactement la situation actuelle, la pandémie ayant engendré une politique monétaire expansionniste. Et dont l'avatar le plus récent est le « quoi qu'il en coûte ». Mais ces mesures de soutien à l'économie, qu'il convient de saluer, insiste Nicolas Bouzou, ont été précédées en 2008 et en 2010, d'initiatives similaires, pour sortir de la crise bancaire et de la crise grecque.
Partie pour durer
Cet environnement favorable à l'inflation n'est donc pas nouveau. Ses éléments déclencheurs le sont davantage. Car les liquidités existent, certes, mais en même temps l'offre se réduit sous l'effet de deux chocs majeurs, la pandémie tout d'abord qui a paralysé la production, puis la guerre en Ukraine qui a provoqué un renchérissement des hydrocarbures et des matières premières comme le blé dur.
Dans ce contexte, l'inflation semble effectivement partie pour durer. Doit-on dans ce cas compenser par une hausse des salaires ? Nicolas Bouzou n'y est pas favorable. D'une part, cette stratégie va introduire une surenchère dans la politique salariale ; d'autre part, cette hausse de salaires ne sera pas nécessairement suivie d'une augmentation de la productivité, avec tous les risques de stagflation que cette conjonction peut entraîner. Reste qu'il faut faire face à un climat social tendu, « les salariés et tout particulièrement ceux de la « première ligne » ayant accumulé des frustrations très fortes au cours des deux dernières années », reconnaît l'économiste, citant en exemple les États-Unis, qui ont augmenté les salaires pour faire face à une inflation d'environ 10 %.
Justifier le prix par la valeur ajoutée
Aussi, davantage qu'un recours à cette politique salariale, Nicolas Bouzou privilégie une aide de l'État par le biais de chèques. « Une solution plus ciblée et moins inégalitaire qu'une baisse de TVA », lâche-t-il. Mais ce n'est là qu'un pis-aller. Comment sortir par le haut de cette situation ? « En conjuguant investissement technologique et investissement humain, y compris dans la connaissance », plaide l'économiste, pour lequel toute hausse de prix doit se justifier par une valeur ajoutée. « Dans ce cas, explique-t-il, il va falloir travailler plus, être plus intelligent, plus inventif pour apporter dans le domaine de la santé l'expérience que le citoyen – rodés aux GAFAM — vit avec les acteurs d'autres secteurs. » « L’expérience client la plus fluide et la plus simple possible, augmentée et soutenue par la technologie, sera la porte de sortie dans cette période où tous les repères se brouillent », expose Nicolas Bouzou.
Et de mettre en garde – dans ce contexte plus que jamais - contre la tentation du discount. Celui-ci répond, certes, dans l'immédiat aux frustrations sociales, mais il ne peut se révéler in fine que destructeur pour l'entreprise et, par extension, pour l'économie. « Le discount ne produit aucune richesse et ne génère que des marges très basses, il ne permet pas d'investissement », déclare-t-il ; et d'affirmer « le discount va nous revenir comme un boomerang ».
D'après une conférence « Vice et vertu du prix : un prix bas, à quel prix ? » aux rencontres de la Fédération du commerce associé (FCA) du 17 mai.
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