LE QUOTIDIEN DU PHARMACIEN.- La profession de pharmacien d’officine traverse une période difficile. Malgré tout, vous animez comme chaque année une conférence lors du salon Pharmagora sur la première installation. Comment allez-vous faire pour motiver les adjoints et étudiants pour qu’ils sautent le pas et deviennent titulaires ?
PHILIPPE BECKER.- Nous croyons toujours en l’avenir de la pharmacie d’officine. C’est pourquoi, avec la foi du charbonnier, nous rempilons et allons expliquer une nouvelle fois que l’installation reste possible malgré les nuages qui s’amoncellent sur la profession.
Il faut d’ailleurs resituer le débat dans un contexte plus large : les professions libérales vivent depuis plusieurs années une période difficile, car le monde évolue, et il leur faut s’adapter. Ce qui est vrai pour les pharmaciens est aussi vrai pour les experts-comptables, les architectes, les biologistes, les notaires, les avocats… Personne n’échappera à l’accélération des mutations technologiques et à l’affaiblissement des protections monopolistiques.
Le QUOTIDIEN DU PHARMACIEN.- Ces changements constituent donc aussi des opportunités ?
CHRISTIAN NOUVEL.- Oui, car ils obligent à repenser la manière d’exercer les professions. Ainsi, les jeunes pharmaciens titulaires devront apporter de nouvelles idées, car certaines vieilles recettes ne marcheront plus.
En outre, comme dans beaucoup d’autres professions libérales, l’interprofessionnalité va progressivement s’imposer, comme le phénomène associatif s’est lui-même imposé dans les années 2000. L’exercice solitaire, qui correspondait à une époque, devient aujourd’hui un handicap, l’isolement au sein de la communauté médicale aussi.
LE QUOTIDIEN DU PHARMACIEN.- Les idées et les initiatives suffiront-elles ? Il faut toujours des fonds importants pour acheter une officine, et les banquiers sont de plus en plus exigeants. N’y a-t-il pas là une contrainte majeure ?
PHILIPPE BECKER.- Si aujourd’hui les exigences bancaires sont fortes et parfois, il faut bien le dire, dissuasives, c’est aussi parce que désormais les prêteurs regardent de près la rentabilité et la solidité financière des projets. C’est tant mieux, car il y aura moins de pharmacies « au tapis » dans les prochaines années. La rigueur bancaire a aussi un effet positif sur les prix de vente, qui redeviennent plus raisonnables, et c’est une bonne nouvelle !
LE QUOTIDIEN DU PHARMACIEN.- Oui, mais comment peut-on faire un prévisionnel lorsque l’activité de l’officine stagne ?
CHRISTIAN NOUVEL.- C’est un exercice de style parfois un peu compliqué. Mais au fond, chaque pharmacie recèle des potentialités cachées, il faut les découvrir. C’est cela le changement : avant, cela venait tout seul, maintenant il faut être inventif !
Il faut toutefois admettre que les modifications de la rémunération qui ont cours actuellement perturbent la visibilité sur les projets.
LE QUOTIDIEN DU PHARMACIEN.- Dans ce contexte, faut-il attendre pour s’installer ?
PHILIPPE BECKER.- Si les prix continuent à s’assagir, le marché va probablement offrir de vraies opportunités. Mais, bien évidemment, les facteurs clés de la réussite resteront l’emplacement de l’officine et une taille suffisante.
Il faut ne pas oublier non plus d’intégrer la pyramide des âges dans notre pays. Des classes d’âge importantes - celles du papy-boom - vont passer du troisième âge vers le quatrième âge, avec des besoins qui croîtront très fortement d’ici à dix ans. Cela constituera un énorme défi pour notre nation, mais une opportunité pour les pharmaciens. La nouvelle croissance aura sans aucun doute des cheveux gris…
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