C’EST PARTI ! La première année d’études de santé est sur les rails. Elle sera effective dès la prochaine rentrée universitaire, en 2010. L’arrêté instaurant un concours commun à la médecine, la pharmacie, l’odontologie et la maïeutique est paru le 17 novembre dernier au « Journal officiel ». Désormais, les étudiants ne vont plus s’inscrire en première année de pharmacie ou de médecine, mais en études de santé. Ils choisiront leur filière au terme du premier semestre, suivant des matières spécifiques. Fortement soutenue par le ministère de l’Enseignement supérieur, cette réforme ne s’est pas faite sans mal. Depuis 2008, elle a suscité débats et contestations, dans les rangs de l’opposition, au Parlement, autant qu’au sein des facultés, avec la fronde en masse des étudiants et aussi de quelques membres du corps enseignant. Fait rarissime, des cours ont même été annulés dans certaines facultés. Deux points restaient cruciaux aux yeux des futurs pharmaciens. Ils redoutaient la disparition de leur spécificité, au profit des matières médicales. Et puis les difficultés de mise en œuvre étaient nombreuses.
L’application de la réforme, d’abord prévue pour la rentrée 2009, a d’ailleurs été repoussée d’une année. « Lorsque ce report a été annoncé, la dynamique s’est un peu arrêtée. C’est dommage », estime Dominique Porquet, président de la Conférence des doyens des facultés de pharmacie et lui-même doyen de la faculté de Chatenay-Malabry. Tout n’est donc pas réglé pour autant. Dans certaines villes, on peine encore à bâtir un programme commun aux différentes filières. La faute aux mauvaises relations entre équipes enseignantes. « Dans 3 ou 4 cas, il y a tentative de mainmise par les facultés de médecine », souligne le doyen Porquet. Mais, globalement, cette redéfinition des programmes s’est effectuée sans difficultés.
Pharmacie par dépit.
Il reste cependant à revoir les coefficients attribués à chaque matière, qui balisent la filière choisie par l’étudiant. Y aura-t-il, malgré tout, des pharmaciens par dépit ? Dominique Porquet est clair : « Peut-être. C’est aux étudiants de voir. Soit ils s’intéressent aux métiers de la santé, soit ils font carrément autre chose ! » Tout aussi épineuse, la question de l’organisation des cours. « Il y a encore beaucoup de sites avec des difficultés logistiques. Elles sont en train d’être réglées », confie le représentant des doyens, à la fois confiant et réaliste. Pour dispenser un cours en simultané à plusieurs milliers d’étudiants, on fait appel à des systèmes de visioconférence. Certaines facultés en sont encore à passer des marchés publics pour acquérir le matériel… « Le processus est lent, mais les outils sont efficaces. Là encore, les choses seront réglées d’ici à la rentrée », affirme le doyen Porquet.
Mais ce système a aussi ses détracteurs. « À deux mille dans un amphi, les étudiants ne peuvent plus poser de questions aux enseignants. Il y a une perte totale de l’interactivité », estime Matthieu Husson, président de l’ANEPF (Association nationale des étudiants en pharmacie de France). Des séances de questions/réponses pourraient donc être mises en place, via Internet, dans certaines universités. Autre souci pratique, l’organisation des enseignements dirigés (ED). Jusqu’ici, ils pouvaient représenter 30 % des cours en pharmacie. Désormais, dans certaines facultés, ils seront tout bonnement annulés. « Cela tient aux habitudes des premières années de médecine de faire ou non des ED. Cela dépend aussi du nombre d’enseignants et des locaux disponibles », note le doyen Porquet. Quant à la réorientation des étudiants en échec, argument choc du gouvernement pour faire passer la réforme, elle a du plomb dans l’aile. L’arrêté l’évoque a minima. La mise en œuvre de passerelles a été reportée à l’année 2011-2012. « Pour le moment, nous n’en avons pas les moyens. Et je ne suis pas sûr que ces dispositions règlent vraiment la question », prévient Dominique Porquet. Après les grandes brassées, dans quelques mois, il n’y aura plus qu’à croiser les doigts.
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