« IL RESTE encore beaucoup d’efforts à faire. » C’est le constat que dressent les étudiants en santé sur la réforme de leur première année. Grâce à une enquête menée dans les 38 universités concernées, la fédération des associations générales étudiantes (FAGE) a mis en lumière « un certain nombre de dysfonctionnements » : programmes surchargés au premier semestre, réduction, voire suppression d’enseignements dirigés, sureffectifs des groupes de travaux dirigés (jusqu’à 200 étudiants), absence de passerelles de réorientation, etc.
Pour Florentin Normand, président de l’Association nationale des étudiants en pharmacie de France (ANEPF), ces derniers sont « les grands perdants de la première année : les étudiants en pharmacie sont venus grossir les promotions et souffrent de la dépersonnalisation des études, avec des cours retransmis par vidéo-projection ou dispensés sur DVD ». Les études de pharmacie ont également perdu beaucoup de matières fondamentales en première année et le nombre d’étudiants dans les enseignements dirigés (ED) est passé d’une moyenne de 45 en P1 pharmacie à 175 en PACES. Certaines universités ont même carrément supprimé ces ED. « Il en résulte des pertes pédagogiques énormes par rapport à la P1 pharma. Si bien que, dans certaines facs, telles que Nantes, une unité d’enseignement (UE) de remise à niveau sera proposée aux futurs deuxièmes années, souligne Florentin Normand. Nous sommes passés d’une année de formation à une année de sélection pure », déplore-t-il. Et la filière pharmacie, qui souffrait déjà d’une perte d’attractivité, voit encore le nombre de candidats reculer : elle en a perdu un tiers depuis 2006.
Réduire les contenus de 10 à 30 %.
Les difficultés révélées par l’enquête des étudiants sont bien connues des doyens. « Le bilan de la réforme est plutôt négatif », reconnaît Dominique Porquet, président de la Conférence des doyens de pharmacie, qui note que « ce constat est unanimement partagé par tous les doyens de pharmacie et de médecine ». Leurs observations rejoignent celles des étudiants : « Le programme est monstrueux », pointe Dominique Porquet. « De ce fait, nous avons observé une baisse de 2 à 3 points de la moyenne des étudiants au premier semestre, ce qui crée des difficultés de réorientations. » L’autre problème majeur, selon le doyen, c’est que la réforme « n’a pas encouragé les étudiants à passer plusieurs concours, ce qui était pourtant l’un de ses objectifs ». Le nombre d’heures supplémentaires que requièrent les UE spécifiques à chaque filière les a découragés, du fait des programmes déjà surchargés. Résultat : ils ont en majorité choisi de passer un seul concours, souvent celui de médecine, au détriment des autres filières. Pour Dominique Porquet, « la balle est maintenant dans le camp des doyens : nous devons corriger les défauts de la réforme afin de parvenir à un résultat acceptable. » Pour cela, ils envisagent notamment des réductions de 10 à 30 % des contenus des programmes. Ils devront aussi trouver des solutions pour revenir « à une part d’enseignements dirigés convenable » et pour « mutualiser les UE spécifiques, afin de ne pas ajouter 150 heures de cours supplémentaires ».
Le problème des passerelles de réorientation est plus épineux. « C’est un énorme travail, très spécifique, pour lequel nous ne sommes pas compétents, estime Dominique Porquet. Une commission y travaille mais, du fait de l’autonomie des universités, il sera difficile de mettre en place un plan national de réorientations. Il est difficile pour nous de reconnaître que cette réforme est un échec, mais nous avons de la marge pour progresser », conclut-t-il.
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