PASSER d’une communication ponctuelle à une collaboration établie. Un véritable enjeu pour les professionnels de santé ; et en particulier pour ceux du premier recours. Car « les médecins généralistes, les pharmaciens d’officine et les infirmières sont incontestablement les premiers professionnels de santé à être en contact avec le patient », explique ce praticien brestois (Finistère). Et son confrère guingampais (Côtes-d’Armor) d’ajouter : « Les professionnels de santé du premier recours doivent coopérer pour constituer une chaîne de soins autour du patient. »
Un objectif pourtant difficile à atteindre pour des soignants plus habitués à se croiser qu’à échanger régulièrement. « Nos échanges dépassent ainsi rarement le stade de l’appel téléphonique en cas d’absence de nos stocks du produit prescrit », déplore ce pharmacien alençonnais. Et pour cause... « L’accueil qui nous est réservé par les médecins n’est pas toujours des meilleurs », surenchérit cette officinale paloise (Pyrénées-Atlantiques) qui explique avec dépit ne plus compter le nombre de fois où des praticiens lui ont « raccroché au nez ».
Une origine dans le cursus universitaire.
Et cette difficulté à échanger trouverait son origine dans le cursus universitaire de chacun. « Les pharmaciens ont toujours été mal considérés par les médecins qui estiment faire partie de l’aristocratie soignante et ont tendance à penser qu’en chaque pharmacien sommeillent un médecin raté et un vil épicier », explique cette pharmacienne limougeaude (Haute-Vienne). Un sentiment partagé par nombre de ses confrères des quatre coins de l’Hexagone qui rappellent ainsi leur difficulté à faire reconnaître leur statut de professionnel de santé par des praticiens « souvent enclins à considérer qu’ils sont encore les seuls à détenir le savoir ».
Une tendance que la réforme des études médicales n’a en rien diminué. Bien au contraire ! « La PACES [première année commune aux études de santé] n’a fait qu’accentuer le phénomène en incitant les premiers à choisir médecine et les suivants à prendre les miettes dont pharmacie », ajoute cet autre officinal de Bourges (Cher). D’où le souhait quasi-unanime de ces professionnels de santé du premier recours de développer les opportunités qui pourraient être offertes aux futurs médecins, pharmaciens et infirmières de se croiser au cours de leur formation.
Apprendre à se connaître.
Et dans cette perspective, la maîtrise de stage leur semble pouvoir se révéler être « un moyen efficace pour que chacun apprenne à se connaître ». « Comment faire comprendre à un étudiant en médecine ce qu’est le quotidien d’un pharmacien d’officine ? », explique ainsi cet officinal ruthénois (Aveyron). Et réciproquement, « comment faire comprendre à un étudiant en pharmacie, ce qu’est la pratique médicale au quotidien », complète ce praticien aveyronnais. Des stages qui, d’un commun accord, permettraient également à ces futurs professionnels de santé de « mieux percevoir l’intérêt d’un exercice libéral et donc pourraient les inciter à franchir le pas ».
Une ambition qui risque pourtant de se heurter aux limites de la législation en vigueur. Car, selon ce praticien périgourdin, « les stages interprofessionnels ne pourront véritablement se développer qu’une fois les textes aménagés ». Responsabilité oblige... Un préalable aussi indispensable qu’urgent selon ces médecins et pharmaciens rouennais (Seine-Maritime) qui y voient là « le seul véritable moyen de faire découvrir aux uns les professions des autres ». Et ainsi de « sortir de la logique des tuyaux d’orgues qui, malheureusement, prédominent toujours, bientôt cinq ans après, la création des agences régionales de santé (ARS) ».
Et cette évolution semble d’autant plus inévitable que les politiques conventionnelles – médicale et pharmaceutique – signées avec l’assurance-maladie conduisent à une évolution de la rémunération des médecins comme des pharmaciens. Car « ce changement de paradigme, voulu par les syndicats signataires et la CNAMTS (Caisse nationale d’assurance-maladie des travailleurs salariés), passera par un rapprochement des différentes professions concernées : médecins, pharmaciens... », estiment ces praticiens et autres officinaux roannais (Haute-Loire).
Comment imaginer en effet développer la rémunération sur objectif de Santé publique (ROSP) sans favoriser préalablement et dès le début des études médicales et pharmaceutiques une prise de conscience réciproque de chacun de ces professionnels de santé. Une tendance qui, selon les praticiens de Millau (Aveyron) s’inscrirait dans la philosophie même du code de déontologie : « Nous devons soigner au mieux par la science mais aussi au meilleur coût. » Un point de vue partagé par la directrice adjointe de la caisse d’Assurance-maladie de Périgueux qui, en attendant, s’est déclarée ouverte pour développer des réunions interprofessionnelles.
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