Le Quotidien du pharmacien. — Les URPS pharmaciens se retrouvent aujourd'hui pour une journée d’échanges*. S’agit-il uniquement de dresser un bilan de l'action de chacune d'elles pendant ces deux ans de pandémie ?
Renaud Nadjahi.- Nous ferons bien entendu un focus sur ce qui s’est passé et sur l’investissement de la profession au cours des deux années écoulées. Les pharmaciens ont été les professionnels de santé les plus impliqués et les plus organisés dans la lutte contre le Covid. Mais au-delà de ce bilan, lors de cette journée à laquelle sont également conviées les URPS d’autres professions de santé, médecins et kinés notamment, sera abordé le rôle des URPS ainsi que la place qu’elles donnent à l’interpro pour faciliter le parcours de soins et l’accès à un professionnel de santé.
Quel bilan tirez-vous de votre expérience de président de l’URPS pharmaciens d’Île-de-France ?
L’avantage de notre région est qu’elle présente un mélange très dense de populations, de langues de cultures, de milieux socioprofessionnels et que, dans ce contexte, la profession a pu vivre des évolutions fulgurantes de ses compétences pour favoriser l’accès aux soins. Que ce soit dans le dépistage, la prévention, avec la vaccination notamment qui, désormais va être élargie.
Un rôle que, une fois de plus, la crise sanitaire a mis en lumière ?
Oui sans aucun doute puisque les URPS – outre leur impact sur la représentativité des syndicats au niveau national — ont pour vocation à travailler de concert avec les ARS afin d’être au plus près des priorités régionales de santé telles qu’elles sont définies dans un territoire donné. Les URPS ont pour objectif d'expérimenter, de mettre en place et d'ajuster des procédures de manière à innover dans les méthodes de travail et le parcours de soins. Aujourd’hui, les URPS sont, par exemple, au cœur du déploiement des CPTS, qui sont des outils sanitaires de proximité infraterritoriaux.
Par conséquent, les URPS sont des laboratoires à l’échelle des régions ?
Oui, c’est certainement le bon niveau d’articulation, et ce travail avec les ARS est aussi de mettre en commun les moyens avec tous les professionnels de santé qui s’engagent. Le numérique détient naturellement une place prépondérante au sein de ces relations, car c’est un lien qui facilite les échanges pour que l’information circule le plus vite possible afin que chacun soit le plus précis possible dans son exercice en disposant de tous les éléments.
Auriez-vous des exemples d’expérimentations lancées par les URPS ?
Ils sont nombreux. L’accès à l'IVG chimique, la téléconsultation, la prise en charge du sevrage tabagique, le TROD Angine, qui a démarré chez nous en Île-de-France, le dépistage colorectal en Corse, ou encore les maladies cardiaques dans les Hauts-de-France. … À chaque fois, le pharmacien, en lien avec les médecins, a prouvé son rôle d’acteur de proximité. La population et les pouvoirs publics se sont enfin aperçus que la pharmacie n’est pas un commerce mais une profession de santé, accessible dans la vraie vie de tous les jours avec un lien d’information avec le médecin traitant.
Autant d’expérimentations devenues missions du pharmacien et aujourd'hui inscrites dans la convention pharmaceutique. Est-ce à dire que les URPS ont désormais atteint leur objectif ?
Non et c’est loin d’être terminé. En dix ans, nous n’avons pas épuisé tous les domaines. Je pense par exemple à la prise en charge des traumatismes bénins sur les chevilles, les coudes, en liens avec les kinés et les médecins généralistes, cela pourrait contribuer à désengorger les urgences… Il reste encore beaucoup de choses à explorer, notamment dans le processus d’accès aux soins. Le pharmacien y joue un rôle déterminant. Une fois sur deux quand on vient le voir pour un conseil, la démarche n’est pas suivie d’une vente.
Certains candidats à l’élection présidentielle prônent la suppression des ARS. En tant que président d’URPS, en lien constant avec une ARS, pouvez-vous comprendre une telle proposition ?
Nous avons eu la chance en Île-de-France d’avoir eu, tout au long de la crise, une ARS très réactive avec laquelle l’URPS a pu fournir un très bon travail. Elle a été très facilitante. Ceci dit, je pense qu’il s’agit d’un parti pris politique, venant de candidats qui ont la volonté de simplifier des structures administratives lourdes, pour les rendre plus réactives. Plus les niveaux décisionnels sont nombreux et plus le processus est lourd pour faire émerger les bonnes initiatives.