Tourisme

Dans les Aravis, la Haute-Savoie au coin du bois

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Publié le 23/02/2023
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L’une est familiale et intimiste. L’autre est populaire et dense. Connectées par leurs domaines skiables, elles promettent des séjours de neige secrets ou, à l’inverse, en pleine lumière. Plongée au cœur de la chaîne des Aravis, entre chalets parfaits et grande nature.

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Le paret, inventé par Manigod

Le paret, inventé par Manigod
Crédit photo : PHOTOS PHILIPPE BOURGET

Manigod l’hiver, c’est la découverte assurée d’une montagne sans défaut. Avec son petit village, ses hameaux aux chalets de bois sur les pentes, ses adresses familiales et ses savoir-faire traditionnels, la commune a le profil de la carte postale. Ce décor s’adosse à la chaîne des Aravis et à son mont Charvin enneigé (2 409 m), l’ensemble étant placé sous la protection du vaste sommet de la Tournette (2 351 m), qui sépare Manigod et sa vallée du bassin d’Annecy. Bref, un monde alpin à part, épargné par les grands aménagements et les constructions malheureuses.

Dans cet écrin, le ski est à taille humaine. Au-dessus du village (dont on ira voir l’église au bel auvent et le buffet d’orgue), le col de La Croix Fry est, avec son voisin le col de Merdassier, le point de départ des remontées mécaniques de la station. Du ski alpin familial mais, avantage notable, connecté au grand domaine voisin de La Clusaz. Aux deux cols, se trouvent des chalets en bois saupoudrés dans les pentes et un petit noyau résidentiel avec commerces – celui de la Croix Fry, avec sa nouvelle résidence MGM, ouvrira en décembre 2023. La Croix Fry, c’est aussi le départ du domaine de ski nordique. Un parcours somptueux sur le plateau de Beauregard avec vue sur le Mont-Blanc par beau temps. Le matin – car c’est le matin qu’il faut pratiquer le ski de fond, avant que la neige ne s’amollisse –, il est fréquent d’y croiser Martin Fourcade, jurassien et jeune retraité sportif installé dans les environs mais toujours pratiquant.

Ski de fond alternatif, skating (dur apprentissage !), ski alpin…, Manigod permet aussi de s’initier aux traîneaux à chiens et au paret. Une simple découverte d’une demi-heure pour le premier sur une boucle enneigée réservée aux Alaskan huskies, véloces et affectueux. Quelques descentes de bas de piste pour le second, sur une luge à un seul patin dont il faut maîtriser l’équilibre avant de crier victoire. La station fête d’ailleurs cet hiver les 30 ans de championnat avec cet engin, inventé il y a bien longtemps à Manigod pour permettre aux enfants des hameaux de rejoindre plus vite l’école du village.

Puisqu’on parle de traditions, évoquons la gastronomie. Nous sommes ici sur les terres des Veyrat, pas besoin de faire un dessin pour dire qu’on y mange bien, voire mieux qu’ailleurs dans les Alpes. Au col de la Croix Fry, l’ex-Maison des Bois de Marc Veyrat est devenue Le Hameau de mon Père, repris en novembre dernier par sa fille Élise, 25 ans. Au col toujours, Renée… Veyrat, 73 ans, tient de main de maître l’hôtel-restaurant Les Sapins, avec son mari Joseph et ses fils Christophe et Emmanuel. Un lieu chaleureux où l’on vient manger (entre autres) la raclette et la manigodine, un reblochon cerclé d’une écorce d’épicéa. Le tout arrosé, il va de soi, d’un verre d’Apremont ou de Chignin-Bergeron.

Dans le genre luxe et tradition, il y a aussi les Chalets-Hôtel de La Croix Fry. Une institution de l’accueil et de la gastronomie. Certes, l’adresse est plutôt onéreuse. Mais avoir l’opportunité d’y passer une nuit rassure sur la qualité de l’hospitalité à la française. Le cadre, classieux et « tout bois », est l’image d’Épinal du chalet alpin. La table, élaborée, enlumine les recettes savoyardes (féra du Léman, tourte au reblochon, plateau de fromages…). Et qui est aux commandes ? Isabelle Loubet et son frère Éric, nièce et neveu de… Marc Veyrat. Marie-Ange Veyrat, la sœur du célèbre chef, a longtemps incarné ce lieu, avant son décès et la reprise de l’affaire par ses enfants. Si l’on avait un doute sur l’adresse, il suffit de rappeler qu’Isabelle et son mari, Édouard Loubet, ont longtemps tenu en Provence La Bastide de Capelongue, double étoilé Michelin. Édouard Loubet, autre grand chef aux multiples activités, officie désormais au Grizzly, un restaurant d’altitude de La Clusaz où il délivre des « plats maison » d’un standing éprouvé. Le savoir de Manigod, c’est également le reblochon. Toute la chaîne des Aravis est le berceau de ce fromage de vache, dont la version « fermier », au lait cru, est la plus goûteuse. Autant de choses à découvrir chez l’affineur Paccard, où les fromages de producteurs locaux mûrissent le temps qu’il faut sur des planches d’épicéa.

La Clusaz propose de son côté la même typicité savoyarde que Manigod, mais dans une dimension élargie. Il suffit de voir le village s’étaler sur les versants, le nombre d’hôtels, de commerces et de restaurants pour comprendre que l’on est ici dans une « vraie » grande station. Elle plaira aux amateurs de ski alpin et d’animations. On peut aussi choisir d’y skier et de retrouver le soir la quiétude rustico-chic de Manigod.

Philippe Bourget

Source : Le Quotidien du Pharmacien