Cette étude observationnelle ne permet pas de « conclure que la carence en fer provoque des maladies cardiaques », précise l’auteur, le Dr Benedikt Schrage, du Centre universitaire de cardiologie et de vascularisation de Hambourg, soulignant cependant que « de plus en plus de preuves indiquent qu'il existe un lien » que des recherches supplémentaires doivent confirmer.
La carence en fer a déjà été associée à un pronostic dégradé chez les patients atteints de maladies cardiovasculaires telles que l'insuffisance cardiaque. Les chercheurs ont donc voulu savoir si cette association se retrouvait en population générale et se sont penchés sur les données de 12 164 patients (âge médian de 59 ans et 55 % de femmes) issues de cohortes allemandes (KORA), suédoise (Northern Sweden Cohort) et norvégienne (Troms Cohort).
Les carences en fer fréquentes
Après exclusion des participants ayant des antécédents de maladie coronarienne ou d'accident vasculaire cérébral (AVC), les sujets ont été classés comme carencés en fer ou non selon deux définitions : une carence absolue (fer stocké mesuré par la ferritine) ou fonctionnelle (ferritine + fer en circulation). « La carence en fer absolue est la façon traditionnelle d'évaluer le statut en fer, mais elle ne prend pas en compte le fer circulant. La définition fonctionnelle est plus précise car elle inclut les mesures de stocks et les cas avec suffisamment de réserves mais pas assez en circulation pour que le corps fonctionne correctement », explique le Dr Schrage.
Au début du suivi, 60 % des participants avaient une carence en fer absolue et 64 % avaient une carence en fer fonctionnelle. Au cours d'un suivi médian de 13,3 ans, 2 212 décès (18,2 %) ont été recensés, dont 4,7 % attribués à une cause cardiovasculaire. Des maladies coronariennes et des AVC ont été diagnostiqués chez, respectivement, 8,5 % et 6,3 % des participants.
Il ressort de l’analyse que la carence absolue sévère (ferritine < 30 μg/l) était associée à la maladie coronarienne (HR : 1,20), mais pas à la mortalité. La carence fonctionnelle en fer en revanche était associée à un risque accru de 24 % pour la maladie coronarienne, à un risque accru de 26 % pour la mortalité cardiovasculaire et à un risque accru de 12 % pour la mortalité toutes causes confondues par rapport à l'absence de carence en fer fonctionnelle.
« L'étude montre que la carence en fer était très répandue dans cette population d'âge mûr, près des deux tiers ayant une carence en fer fonctionnelle. Ces personnes étaient plus susceptibles de développer une maladie cardiaque et étaient également plus susceptibles de mourir au cours des 13 prochaines années », résume le Dr Schrage, soulignant l’intérêt d’un essai randomisé étudiant l'effet du traitement de la carence en fer dans la population générale. D’ores et déjà, les auteurs voient dans la supplémentation en fer par voie orale, déjà pratiquée chez les personnes âgées, une option de prévention précoce des maladies cardiovasculaires.