Ceux de nos concitoyens qui ont conservé un minimum de logique demeurent perplexes : ils ne comprennent pas que les manifestants réclament, non sans violence, l'abolition d'une mesure dont le gouvernement a déjà annoncé qu'elle serait supprimée sous peu. C'est pourtant très simple : il y a un plaisir, un bonheur, une joie, une volupté à crier haut et fort qu'on est contre. Contre quoi ? Question sans importance. Contre. Les bons analystes font tous référence au long et fastidieux épisode des gilets jaunes et, effectivement, il y en a eu parmi les manifestants. Les gilets exigeaient de l'argent, du fric, de l'oseille, ils en ont eu. Les mécontents du week-end dernier ne sont pas des gens vénaux, ils veulent seulement ne pas être vaccinés, et bien entendu, ils sont fous de rage face à la hausse des prix des carburants.
Inutile de leur dire qu'on ne peut rien contre la hausse des prix. Les exportateurs de pétrole jouent à la hausse, elle ne se dément pas. Que ne vont-ils hurler leur rage en Arabie saoudite ! Mais Paris et Bruxelles étaient bien plus proches. Ce sont des endroits familiers où l'on peut défigurer à souhait la France et l'Europe. Le gouvernement a fait ce qu'il a pu pour limiter les dégâts et a interdit diverses manifestations illégales. Mais ceux-là savent fort bien passer entre les mailles du filet. Le désordre est leur vocation, la chute de Macron est leur objectif, la fin de la République leur propos.
Ce sont nos ennemis
De fait, et pardonnez-moi d'être aussi réaliste, ce sont nos ennemis. Ce n'est pas un hasard si ces mouvements ont eu lieu à quelques semaines du premier tour de l'élection présidentielle. Ce qu'on ne peut pas obtenir par les urnes, on va le chercher en rendant le désordre intolérable. Qui pouvait aller au cinéma ou au restaurant samedi dernier à Paris, avec ou sans masque, avec ou sans passe vaccinal ? Personne. Aussi bien le ministre de la Santé, bête noire du peuple, était-il cette fois totalement innocent. Le coupable était le ministre de l'Intérieur, prompt à réprimer les manifestations interdites, notamment celles qui étaient fomentées par des organisations étrangères.
Vous aurez remarqué l'absence complète des syndicats dans cette affaire, qui veulent appliquer la dialectique renvendication-compromis, mais ne risquaient pas de se compromettre dans une mésaventure qui signe la fin de tous les équilibres mentaux. Et pourtant, une occasion historique leur est offerte. Aujourd'hui, pour avoir du succès, il faut être dingue, illogique, sombrer dans le délire au sujet d'un épouvantail qui n'existe pas. En période électorale, on peut toujours demander la lune. Ce n'est pas celui qui risque d'être battu qui hésitera à vous satisfaire.
Ainsi va le monde, ou plutôt la France, la Belgique, l'Europe, après le Canada. Notez qu'au Canada, ce n'est pas le gouvernement qui demande aux routiers un passe en règle, mais les autorités américaines. Que ne vont-ils saccager l'État de New York ou celui d'Illinois ? Pas besoin d'aller s'exposer à une répression policière massive, comme les Américains en ont l'habitude, il suffit d'avoir la peau de Justin Trudeau, dont les appels au calme sont recouverts par le bruit incessant des klaxons. Ils n'ont pas raison parce qu'ils ont des arguments, mais parce qu'ils sont tonitruants, idiots, absurdes et heureux de l'être.