Fin janvier, les chercheurs de l'institut canadien avaient rapporté que la colchicine aux propriétés anti-inflammatoires pouvait réduire les complications et la mortalité chez les malades infectés par le SARS-CoV-2. L'équipe dirigée par le Pr Jean-Claude Tardif s'appuyait pour cela sur les résultats préliminaires de l'étude Colcorona − dont les résultats définitifs viennent d'être publiés mi-mai − menée chez des patients non hospitalisés âgés d'au moins 40 ans et ayant au moins un facteur de risque de forme grave.
Recovery chez plus de 11 000 patients
Dans la foulée, la Grèce avait autorisé la prescription du médicament pour traiter le Covid-19. Mais la communauté scientifique internationale restait sur la réserve, faute de preuves suffisamment convaincantes. L'autorité officielle québécoise chargée des médicaments avait même jugé « prématuré d'appuyer l'usage de la colchicine chez les personnes non hospitalisées avec un diagnostic » de Covid-19.
Les résultats de Recovery, prépublié le 18 mai sur « medRxiv » mais encore non publiés, ont mis en évidence l'absence de bénéfice clinique chez plus de 11 000 patients : mortalité, durée d'hospitalisation et risque de ventilation mécanique ne sont pas améliorés dans le groupe colchicine. Dès le 5 mars, les responsables de Recovery avaient décidé d'interrompre l'essai sur la colchicine.
Colcorona, un effet limité
Dans Colcorona qui a inclus 4 488 patients de six pays (Brésil, Canada, Grèce, Afrique du Sud, Espagne et États-Unis) ayant un Covid confirmé par PCR ou des symptômes cliniques, le groupe colchicine recevait 0,5 mg deux fois par jour pendant 3 jours puis une fois par jour pendant 27 jours.
Avec comme critère principal composite les décès et les hospitalisations pour Covid, l'essai n'a pas montré de différence significative entre les deux groupes : 104 événements chez les 2 235 patients du groupe colchicine (4,7 %) versus 131 chez les 2 253 du groupe placebo (5,8 %) (p = 0,081).
Mais en ne prenant que les 4 159 patients ayant un Covid confirmé, la différence devient significative avec 96 événements chez les 2 075 patients du groupe colchicine (4,6 %) et 126 chez les 2 084 du groupe placebo (6,0 %). De plus, la survenue d'une pneumonie était moins fréquente dans le groupe colchicine (2,9 versus 4,1 %). Les événements indésirables graves étaient plus fréquents dans le groupe colchicine (108 versus 139, soit 4,9 % versus 6,3 %), la diarrhée était deux fois plus fréquente (300 versus 161, soit 13,7 versus 7,3 %).
Pour les auteurs, les résultats observés chez les patients ayant un Covid confirmé amènent à considérer cette molécule « bien tolérée et peu coûteuse » chez les patients à risque, compte tenu de l'absence de thérapies orales disponibles. Les chercheurs appellent néanmoins à vérifier ces résultats dans d'autres études chez des patients ambulatoires avec PCR positive.