Ces pharmaciens devenus présidents de la République

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Publié le 15/02/2022
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En cette année électorale, il serait plus qu’improbable que le prochain locataire de l’Élysée soit un de vos confrères. Pourtant, à travers le monde, des pharmaciens sont parvenus à la plus haute marche du pouvoir… ou l’ont manquée de peu.

Censu Tabone

Censu Tabone, président de la République de Malte de 1989 à 1994
Crédit photo : DR

Hubert Hymphrey

Hubert Hymphrey, vice-président des États-Unis de 1965 à 1969

La pharmacie mène à tout, et mena ainsi le pharmacien Censu Tabone à la présidence de la République de Malte, pour un mandat qu’il exerça de 1989 à 1994, après avoir occupé de nombreux postes ministériels. Né en 1913 sur l’île de Gozo, la seconde des trois îles de l’archipel maltais, alors possession britannique, il étudia la pharmacie à La Valette et en sortit diplômé en 1933, avant de se tourner assez rapidement vers la médecine, et plus particulièrement l’ophtalmologie. Sa carrière politique commence vraiment lorsque Malte accède à l’indépendance, en 1964. Élu député, il occupa ensuite de hautes fonctions gouvernementales et diplomatiques, couronnées par sa présidence, une charge toutefois plus honorifique que réellement politique. Unanimement respecté, il mourut en 2012 à la veille de ses 99 ans.

Si le plus petit pays de l’Union européenne, avec ses 525 300 habitants, peut se flatter d’être le seul État à avoir eu un président pharmacien, la première puissance mondiale a quant à elle manqué de peu d’en avoir un : en 1968, le démocrate Hubert Humphrey, vice-président des États-Unis depuis 1963, fut battu par le Républicain Richard Nixon.

Humphrey, vice-président des États-Unis

Humphrey naquit en 1911, juste au-dessus de la pharmacie de ses parents à Wallace, une bourgade agricole du Dakota du Sud où il passa son enfance. Naturellement destiné à reprendre un jour l’officine familiale, il étudia la pharmacie à Minneapolis, puis, une fois diplômé, lui adjoignit un petit laboratoire qui produisait notamment des bâtons pour inhalations nasales et des spécialités vétérinaires. Mais rêvant d’autres horizons, il se lança rapidement dans une carrière politique, d’abord locale puis nationale. Longtemps sénateur, il fut rapporteur de nombreuses lois dont, pharmacie oblige, une nouvelle classification des médicaments séparant clairement les spécialités prescriptibles et les OTC. L’assassinat de John F. Kennedy, le 23 novembre 1963, le propulse indirectement à la tête du pays : il est alors proche du vice-président Lyndon Johnson, lequel, après l’attentat de Dallas, succède au président assassiné, transmettant son poste de vice-président à Humphrey. Un an plus tard, Johnson et Humphrey se présentent sur le même « ticket » aux élections présidentielles de 1964, et sont élus ensemble. En 1968, Johnson se retire et Humphrey mène la campagne : longtemps favori et majoritaire en voix, mais pas en sièges, il perd de peu face à Nixon, dont on connaît par ailleurs la triste fin politique dans les méandres du Watergate, à l’été 1974. Humphrey, lui, retrouve son siège de sénateur, qu’il occupera jusqu’à sa mort, en janvier 1978.

Si les quelques études recensant les professions des chefs d’État des 197 pays du monde ne citent pas d’autres présidents pharmaciens, le nombre d’élus pharmaciens siégeant dans des assemblées nationales, régionales ou locales justifierait à lui seul la rédaction d’un imposant annuaire. Restons modestes et, puisque nous élirons nos députés en juin prochain, rappelons que l’Assemblée nationale compte actuellement 8 pharmaciens, mais aussi qu’une pharmacienne, Roselyne Bachelot, fait partie du gouvernement en tant que ministre de la Culture.

Sous la cinquième République, d’autres pharmaciens, élus d’abord localement, se sont fait ensuite un nom dans la politique nationale, à l’image de Robert Fabre ou de Franck Sérusclat. Au total, depuis la première Assemblée élue au suffrage universel, en 1848, jusqu’à la fin du XXe siècle, un peu plus d’une centaine de pharmaciens y ont siégé, le plus souvent dans les rangs centristes ou de la gauche modérée.

Denis Durand de Bousingen

Source : Le Quotidien du Pharmacien