De nombreux malades atteints de cancers, de maladies chroniques, se soignent avec des médicaments dits « biologiques », issus d’organismes vivants et produits grâce à des procédés biotechnologiques. Lorsque le brevet des médicaments biologiques tombe dans le domaine public, les industriels sont autorisés à produire des médicaments dits « biosimilaires », à ne pas confondre avec les médicaments génériques, car leur nature biologique ne les rend pas copiables à l’identique.
Interchangeabilité
Dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2020, les parlementaires et le ministère des Solidarités et de la Santé ont modifié la réglementation des médicaments biosimilaires en choisissant de confier au médecin, dans un dialogue avec le patient, la décision du passage d’un médicament biologique dit « de référence » à un médicament biosimilaire (ce changement étant alors appelé « interchangeabilité »), plutôt qu’au pharmacien (ce changement étant alors appelé « substitution »). L’interchangeabilité est pour nous également une garantie de la sécurité, du bon usage, de la traçabilité, du suivi clinique et de la confiance entre le patient et ses professionnels de santé.
De nouvelles évolutions à l’étude
Début avril 2021, le ministère des Solidarités et de la Santé a formé un groupe de travail réunissant des représentants de l’ensemble des parties prenantes (patients, médecins, pharmaciens, industriels, assurance-maladie et Agence nationale de sécurité des médicaments et des produits de santé - ANSM). L’objectif est de proposer des évolutions de la réglementation permettant d’accroître l’usage des médicaments biosimilaires, et, partant, les économies qu’ils génèrent. Les médicaments biosimilaires, approuvés selon les mêmes normes de qualité, de sécurité et d’efficacité pharmaceutiques que celles qui s’appliquent à tous les médicaments biologiques via un développement clinique robuste et des procédés de fabrication de pointe, sont un levier d’accès aux soins pour les malades grâce à leur capacité à générer des économies. Leur prix étant plus faible, ils sont un moyen de concourir à la maîtrise des dépenses de santé. Les économies ne doivent toutefois pas répondre uniquement à une logique opportuniste mais s’envisager sur le long terme.
L'intérêt des patients
La réglementation et le modèle des biosimilaires doivent reposer sur la décision médicale partagée et l’interchangeabilité. Ce modèle ne sera pérenne que s’il garantit l’implication des patients et des professionnels de santé, car cette implication est l’une des conditions de la confiance nécessaire à l’amélioration de l’observance et du bon usage. C’est aussi pourquoi cette évolution ne pourra être mise en œuvre que si les patients et les professionnels de santé sont informés, sensibilisés et formés aux médicaments biosimilaires. Les pharmaciens sont des acteurs clés du parcours de soins dans la dispensation d’un biosimilaire à un patient, dans le cadre de son suivi et dans l’observance.
Des différences importantes
Des disparités existent quant à l’utilisation des médicaments biosimilaires au niveau européen. Ces différences sont parfois liées à la réglementation nationale (catégories de médecins autorisés à les prescrire, usage strictement hospitalier ou en pharmacie d’officine), parfois liées à d’autres facteurs, notamment économiques (incitations à l’achat pour les hôpitaux ou à la prescription par les médecins), dans l’éducation (apprentissage du dispositif d’auto-injection par les patients ou information délivrée par les professionnels de santé) ou encore culturelles.
La France est régulièrement présentée comme un mauvais élève. Elle fait pourtant partie des leaders européens et les taux de pénétration à l’hôpital en France parlent d’eux-mêmes, allant de 64 à 86 % selon les molécules. En ville, la marge de progression est plus importante, pour les biosimilaires disponibles en pharmacie d’officine et que les médecins généralistes sont autorisés à prescrire.
Quatre propositions
Notre collectif de signataires, dans une logique constructive, a formulé 4 propositions pour soutenir un développement des médicaments biosimilaires dans l’intérêt des tout premiers concernés, les patients :
▪ la décision médicale partagée est, et doit rester, le cadre principal permettant le passage d’un médicament biologique de référence à un médicament biosimilaire : nous en faisons un principe cardinal ;
▪ si les molécules relevant de la prescription initiale hospitalière doivent rester dans le champ de l’interchangeabilité, nous sommes néanmoins favorables à l’évaluation de la substitution pour certains biosimilaires définis par l’ANSM, après consultation des sociétés savantes et des associations de malades concernées ;
▪ l’interprofessionnalité est indispensable à la qualité de l’accompagnement des malades utilisant des médicaments biologiques. Chaque professionnel de santé a un rôle important à jouer dans la prescription, la dispensation et l’éducation thérapeutique et doit trouver une juste valorisation ;
▪ les expérimentations de type « article 51 » visant à renforcer la prescription des médicaments biosimilaires à l’hôpital ont fait leur preuve et doivent être étendues, simplifiées et pérennisées.
L’actualité doit nous pousser à tirer les enseignements du rapport que les citoyens ont à leurs médicaments, et leur confiance affichée envers leurs professionnels de santé n’y changera rien. Dès lors que la confiance est rompue entre le malade, ses professionnels de santé et son traitement, toute tentative de légiférer sera vaine. Une démarche constructive est la seule à même d’accompagner le développement des médicaments biosimilaires sur le long terme.
Restons unis dans l’effort collectif.