n matière de sports d’hiver en France, il n’y a pas que les Alpes. Comme les Pyrénées, les Vosges ou le Jura, le Massif Central offre une alternative conviviale au « tout ski » des grandes stations savoyardes et de leurs domaines XXL. Y aller est d’autant plus opportun cette année que les domaines skiables, crise du Covid-19 oblige, risquent d’être fermés toute la saison. Le Massif Central, ce sont les stations du Lioran, de Super Besse, du Mont-Dore. Mais aussi un ensemble de hauts plateaux où « grand blanc » rime avec apaisement. Le Cézallier, le Carladès, la Margeride, le Livradois-Forez, l’Aubrac : autant de terroirs à forte identité et traditions, avec un air de bout du monde lorsque la neige s’y installe.
L’Aubrac est l’un des plus fascinants. Entre 1 000 et 1 400 m d’altitude, ce plateau désertique aux formes douces s’étend à l’infini, telle une steppe orientale. L’habitat est rare, concentré dans quelques villages de granit et de schiste dominés par des clochers à peigne. Laguiole (Aveyron), Nasbinals (Lozère), Saint-Urcize (Cantal) sont les petites capitales de ce pays émaillé de bourgs perdus, Marchastel, Les Salces, La Fage-Montivernoux…
Perdues dans ce décor, des maisonnettes de pierre, les burons, rappellent qu’autrefois des bergers vivaient l’été au milieu des prairies, gardant les vaches et fabricant tommes et fourmes. On ne passera pas loin d’eux en ski de fond, sur l’un des cinq espaces nordiques du territoire. Laguiole est le principal. Avec ses 50 km de pistes autour du Puech du Roussillon (1 407 m), il offre de superbes passages dans les sous-bois givrés et les prairies. 30 km de parcours sont aussi balisés pour les randonnées en raquettes. Deux prestataires, Nord Aveyron Mushing et Aubrac Rando, proposent des sorties en traîneau à chiens et à vélo tout-terrain (fat bike) électrique.
Petit Versailles et gourmandises
On passe côté Lozère sans même s’en rendre compte – étranges découpages administratifs qui séparent en trois ce plateau pourtant taillé d’une seule pièce… Voici Nasbinals et ses robustes demeures. À 2 km, la station du Fer-à-Cheval est le point de départ de pistes de fond. La plus longue emprunte une partie du GR65, célèbre itinéraire de randonnée vers Saint-Jacques-de-Compostelle. Idée de voyage pédestre à retenir pour l’été, histoire d’apprécier différemment la solitude du plateau. Autre option, dès avril : la visite du château de la Baume. Cette longue bâtisse grise des XVIIe et XVIIIe siècle, richement aménagée, a été pompeusement surnommée le « petit Versailles du Gévaudan ». Ses meubles, tapisseries et tableaux tranchent avec la rusticité alentour.
Les autres domaines nordiques – les 5 sont connectés par des pistes de liaison –, Saint-Urcize (35 km de piste de fond, 21 km de parcours raquettes), Bonnecombe et Brameloup, maillent l’Aubrac de leurs sillons blancs.
En circulant sur le territoire, quelques panneaux moins sportifs alertent le voyageur : « aligot », « saucisses de terroir », « vente de fourmes », « viande d’Aubrac à la ferme »… Bienvenue en pays gourmet ! Ici, la table prend plaisir à faire oublier la rudesse des paysages. Hors pandémie, impossible de manquer le restaurant iconique de Laguiole, Le Suquet (Sébastien Bras, ouvert à partir d’avril), incarnation de l’alliance entre talent et terroir. Les villages cachent aussi des tables d’exception abordables. À La Route d’Argent (Nasbinals), à l’hôtel L’Aubrac (Laguiole) ou au Coudercous (Saint-Chély-d’Aubrac), le terroir aux paysages infinis sait nourrir l’homme qui a succombé à ses charmes.