Entre 2021 et fin mars 2023, les demandes d'assistance médicale à la procréation (AMP) avec don de sperme ont été multipliées par huit. Plus de 80 % d'entre elles viennent des femmes en couple homosexuel ou seules, ces dernières représentant une nouvelle patientèle, parfois très jeune, déroutant souvent les professionnels de santé.
Par conséquent, les délais d'attente se sont étirés, jusqu'à plus de 14 mois, avec des différences selon les centres. Idem pour l'autoconservation ovocytaire hors indication médicale, autre nouveau droit ouvert par la loi de bioéthique de 2021 : les femmes doivent patienter en moyenne sept mois et jusqu'à 24 en Île-de-France, qui concentre 25 % des demandes.
Moyens financiers et harmonisation des pratiques
Pour répondre à ces sollicitations dont l'ampleur n'avait guère été anticipée, les centres de don de gamètes ont reçu des moyens supplémentaires (12,8 millions en 2021 et 2022) et trois nouvelles structures ont été créées à Limoges, Orléans et Poitiers. Les règles de bonnes pratiques cliniques et biologiques d'AMP ont été mises à jour, via un arrêté publié en octobre au Journal officiel, censé les harmoniser et les simplifier. Des travaux sont en cours pour repenser la place des structures privées, qui pourraient prendre en charge les bilans et les tests préalables.
Par ailleurs, un décret est venu fixer au 31 mars 2025 la date à compter de laquelle seuls les gamètes (et les embryons qui en sont issus) dont les donneurs ont consenti à la transmission de leurs données pourront être utilisés. Ceci afin de permettre aux enfants issus d'un don d'avoir un accès simplifié à leurs origines. L'Agence de la biomédecine réfléchit à une éventuelle mutualisation des stocks de paillettes, aujourd'hui très hétérogènes selon les centres, afin d'accélérer le passage à ce nouveau régime sans détruire de dons.
Dans un contexte de dégradation de l'hôpital public, les défis restent nombreux, d'autant que les demandes ne faiblissent pas et traduisent des mutations profondes de la parentalité. L'Agence de la biomédecine tente de sensibiliser les professionnels de première ligne aux problématiques émergentes.
Le gouvernement, en revanche, n'a jusqu'à présent pas donné suite au rapport sur l'infertilité que lui a remis en 2022 le Pr Samir Hamamah (CHU de Montpellier). Y étaient dessinés les contours d'une stratégie nationale pour prendre en charge ce problème de santé publique qui touche 3,3 millions de Français.
Infertilité : une personne sur six touchée dans le monde
Environ 17,5 % de la population adulte est touchée par l’infertilité, selon un rapport de l'Organisation mondiale de la santé (OMS), publié le 4 avril. Ce « défi sanitaire majeur », qui touche indistinctement les pays, réclame d’accroître l'accès à des soins abordables et de haute qualité.
L'infertilité reste stigmatisée, et les personnes concernées souffrent souvent d'anxiété et de dépression, voire de violences conjugales. Sans compter que les coûts financiers sont souvent très élevés.
L’OMS encourage les pays à développer la prévention, le diagnostic et le traitement de l'infertilité – y compris les technologies de procréation assistée telles que la fécondation in vitro.