Le « Forum économique des pharmaciens » est l’occasion pour la profession de publier tous les chiffres compilés au cours de l’année écoulée et fournit aussi bien des données fondamentales que d’autres parfois plus anecdotiques. En 2020, ont détaillé jeudi dernier les économistes de l’ABDA, l'association faîtière des pharmaciens allemands, le nombre d’officines a poursuivi sa baisse, mais moins fortement que les années précédentes, pour se fixer à 18 753, avec à peine 85 ouvertures contre près de 500 fermetures, et une tendance croissante à la « filialisation ».
Le contraste s’aggrave entre les petites pharmacies qui souffrent et les grandes qui prospèrent, mais en 2020 les officines situées dans les centres commerciaux et les gares ont été particulièrement malmenées. Le chiffre d’affaires moyen est passé de 2,59 à 2,78 millions d’euros, mais 60 % des officines ne l’atteignent pas, le chiffre d’affaires médian tournant autour de 2 millions. La baisse du nombre de points de vente et les prix élevés de certains nouveaux médicaments expliquent en grande partie cette progression, tandis que le résultat net est passé de 5,7 % en 2019 à 6,1 % en 2020, soit 168 000 euros.
OTC en baisse
En volume comme en chiffre d’affaires, la part des OTC ne cesse de diminuer par rapport aux prescriptions (7,9 % contre 83,2 %), face à une progression régulière des ventes en ligne : elles ont atteint 20 % du marché des OTC, et sont réalisées pour moitié par des pharmacies virtuelles allemandes et pour moitié par des plateformes basées aux Pays-Bas.
En officine, les ventes d’OTC ont baissé de 12 %, et même de 27 % pour les OTC contre les refroidissements et les rhumes. Cette chute, logique en raison de la faiblesse des maux de l’hiver liée notamment aux gestes barrières, a pourtant été compensée par une hausse spectaculaire des ventes en ligne de ce segment. Un phénomène comparable a été relevé, mais dans des proportions moindres, pour les antalgiques. De plus, les ventes de prescriptions remboursables réalisées par des plateformes « étrangères » ont progressé de plus de 8 %, pour atteindre 457 millions d’euros, soit 1,15 % de ce marché.
Innover face à l'effet Covid
Par ailleurs, les pharmaciens n’ont jamais vendu autant de vaccins contre la grippe qu’en 2020… mais celle-ci a été historiquement basse durant l’hiver 2020/2021, puisque seulement 642 cas ont été recensés, contre près de 200 000 en année normale. En outre, l’ABDA a calculé que chaque pharmacie avait dépensé en moyenne 2 500 euros pour installer des cheminements et des plexiglas dans leurs locaux en raison du Covid. Et 75 % des officines ont produit elles-mêmes des solutions désinfectantes, avec en moyenne 400 litres par pharmacie. Les officines ont aussi distribué, en trois vagues, plus de 400 millions de masques payés totalement ou partiellement par l’assurance maladie et destinés aux personnes âgées ou vulnérables. Enfin, les livraisons à domicile, déjà très fréquentes, ont bondi en 2020 : près de 98 % des pharmacies en proposent désormais, avec une prise en charge partielle par l’assurance maladie.
Malgré ces bilans contrastés, le président du syndicat des pharmaciens (DAV), Thomas Dittrich, appelle ses confrères à garder confiance, mais aussi à se montrer vigilants. Il leur conseille de se faire entendre des candidats lors des élections législatives à venir, notamment sur la question des services et de leurs rémunérations. Mais il souligne aussi que, quel que soit le vainqueur, l’assurance maladie remettra très vite en ordre ses finances malmenées par le Covid : aux pharmaciens donc de savoir innover pour ne pas être seulement invités à payer les pots cassés.