Dans son laboratoire de Nancy, Igor Clarot, professeur en métrologie du médicament, étudie, contrôle et produit des nanoparticules. Directeur adjoint de CITHEFOR, une unité de recherche de l'université de Lorraine, il estime que ces dernières pourraient tout simplement représenter « l'avenir du médicament ». Obtenues par synthèse lorsqu'elles sont organiques et parfois par broyage lorsqu'elles sont inorganiques, les nanoparticules ne peuvent excéder une taille supérieure à 100 nanomètres selon la norme internationale. En dessous de cette dimension, certaines propriétés physiques, comme la perméabilité, changent de manière radicale. Grâce à leurs caractéristiques, les nanoparticules peuvent donc augmenter la surface d'échanges, en plus de protéger plus efficacement le principe actif contenu dans le médicament. Les cellules et les macrophages parviennent à les capter, alors que cela est impossible lorsqu'il s'agit de particules de taille normale. Face aux limites inhérentes aux traitements par injections, les nanoparticules offriraient donc une meilleure biodisponibilité et donc de meilleurs résultats au niveau thérapeutique. Plus prometteur encore, les nanoparticules parviendraient à traverser certaines membranes, ouvrant ainsi la voie vers de futurs traitements innovants. Des nanoparticules de fer sont déjà utilisées pour apporter une supplémentation à des patients souffrant de carences.
Un produit pharmaceutique comme les autres ?
Si l'on commence tout juste à entrevoir le potentiel thérapeutique des nanoparticules, de nombreux points ne font pas encore consensus au sein de la communauté scientifique, à commencer par leur définition même. Si une norme internationale existe bel et bien, « la limite magique des 100 nanomètres », n'a, aux yeux de certains scientifiques, aucun sens d'un point de vue physico-chimique. D'autres doutes restent à lever. Difficile, par exemple, de prévoir la vitesse de dissolution d'une particule si l'on modifie sa structure de surface. En pleine polémique sur la présence de dioxyde de titane (E171) dans les médicaments et l'alimentation, sans compter les études très controversées sur l'emploi des adjuvants aluminiques dans les vaccins, des professionnels de santé ne s'avouent pas rassurés par l'utilisation des nanoparticules et notamment par leur capacité à pénétrer les macrophages. Leur stabilité à long terme pose question pour certains chercheurs et les impuretés qu'elles peuvent contenir sont encore très mal connues, comme le confirme Igor Clarot. « Si les organiques sont biodégradables, les connaissances sont très vagues concernant les inorganiques ».
Si l'industrie pharmaceutique, à l'instar de Sanofi, s'investit ces dernières années dans le domaine du submicronique, elle n'oserait pas encore passer la vitesse supérieure au sujet des nanoparticules. « Leur réticence vient peut-être du fait que la législation à ce sujet, qui ne propose rien de concret aujourd'hui, pourrait évoluer à l'avenir. Difficile pour eux de prendre le risque de mettre sur le marché un médicament comprenant une nanoparticule alors que des lois plus strictes seront peut-être bientôt appliquées », analyse Igor Clarot.
Une monographie spécifique à chaque nanoparticule
Si l'être humain est confronté depuis toujours aux nanoparticules dans son environnement, leur production est, elle, très récente et n'est pas soumise à une réglementation suffisamment contraignante pour certains observateurs. Alors que certains évoquent leur potentiel caractère cancérigène, Igor Clarot estime donc qu'elles devraient donc être « considérées comme des matières premières pharmaceutiques comme les autres ». Déterminer une monographie « spécifique à chaque nanoparticule » paraît inévitable et indispensable aux yeux du chercheur nancéien, qui a parfois eu quelques surprises en analysant les lots achetés auprès de certains industriels. La durée de stabilité affichée par le fabricant, facteur déterminant pour estimer la qualité du produit, étant parfois bien supérieure à celle constatée lors de ses analyses. « Toutes les nanoparticules ne font pas encore l'objet d'études de stabilité suffisamment poussées, c'est même assez rare aujourd'hui ». Un taux de stabilité qui a une influence directe sur la présence d'impuretés, or ce sont ces dernières qui inquiètent en particulier. « Les professionnels de santé, et les pharmaciens particulièrement, vont être questionnés par la population sur ce sujet. Face aux discours alarmistes, il faut plus de clarté ».
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