L’embellie sur l’économie officinale se fait attendre depuis la sortie du confinement. Non seulement les projections esquissent un infléchissement de l’activité, de l’ordre de 15 à 20 % en moyenne pour le mois de mai, mais, de surcroît, l’officine doit faire face à des coûts d’un nouveau genre. Il s’agit des dépenses effectuées pour préserver la santé des salariés et celle des patients face au coronavirus, qui est toujours en circulation.
Dès le début de l’épidémie, les pharmaciens se sont équipés en plexiglas faisant office d’hygiaphone, ils ont développé des stratégies pour faire circuler le public en toute sécurité dans l’espace de vente, parfois effectué des livraisons au domicile des patients les plus fragiles. Ces dispositifs perdurent depuis la sortie du confinement, auxquels s’ajoutent de nouvelles mesures : protection du personnel avec des masques chirurgicaux, des visières, des gants et des surblouses, distributeurs de SHA à l’entrée de l’officine pour les patients et nettoyage scrupuleux des surfaces. Sans oublier le film protecteur pour recouvrir les terminaux de paiement et même, dans certaines officines, l’installation d’appareils de décontamination de l’air, censés « détruire les pathogènes environnementaux ».
Les aides prévues
L’ensemble de cet arsenal anti-Covid a un coût qui, bien entendu, n’avait pas été budgétisé dans les comptes de l’officine. On est certes loin des quelque 100 000 euros de surcoût par semestre engendrés par les protocoles de sécurité Covid dans un supermarché. Il n’en reste pas moins que le respect des règles sanitaires entraîne de nouvelles lignes de dépenses. Car, outre les frais de consommables et l’investissement en nouveau matériel, ces consignes supposent une intervention humaine.
« J’estime à une heure et demie par jour le temps passé à l’application des gestes de sécurité masques, nettoyage des surfaces et ménage compris », déclare Gilles Bonnefond, président de l’Union des syndicats de pharmaciens d’officine (USPO). Partant du même constat, la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF) a demandé aux pouvoirs publics de tenir compte de ces nouvelles dépenses en accordant une « prime Covid » aux pharmaciens. Celle-ci est destinée tant à couvrir la distribution des masques aux professionnels de santé de début mars à la mi-mai que les frais inhérents à l’équipement de l’officine contre la contamination.
Les pharmaciens ont, en effet, pour recommandation de se conformer à certaines mesures énoncées par le ministère du travail (1) : du nettoyage du comptoir avec des lingettes désinfectantes à celui des équipements collectifs tels les imprimantes, les photocopieurs ou encore la machine à café, en passant par l’agencement de la salle de repos ou encore la réception des livraisons. L’association PharmaSystèmeQualité a par ailleurs édité un document portant sur « la reprise de l’activité après le déconfinement », dispensant des conseils pour stabiliser les dispositifs sanitaires de l’officine. Du parcours client à la protection des équipes et à l’espace de confidentialité, les procédures sont balisées par les bonnes pratiques.
Afin de pouvoir faire face à ces nouvelles contraintes, 48 % des pharmaciens déclarent « solliciter une aide financière pour la mise en place de ces nouvelles mesures sanitaires » dans un sondage en ligne du « Quotidien du pharmacien ». Parallèlement à la « prime Covid », qui fait l’objet d’une négociation entre les syndicats de la profession et l’assurance-maladie, une autre aide est proposée par l’assurance-maladie. Elle vise à soutenir les TPE et PME de moins de 50 salariés pour se prémunir du Covid-19. Cette subvention « Prévention Covid » prend en charge jusqu’à 50 % de l’investissement en équipements de protection (mesures barrières et de distanciation physique ainsi que les mesures d’hygiène et de nettoyage), à concurrence de 5 000 euros. À noter que les frais engagés, à l'exclusion des achats des gants et des lingettes, doivent atteindre au moins 1 000 euros HT pour les entreprises de 1 à 49 salariés (2).
Coûts cachés
D’ores et déjà, il apparaît que ces deux aides de l’assurance-maladie ne seront pas cumulables. Un calcul s’avère donc nécessaire. Pour autant, Olivier Desplats, expert-comptable, commissaire aux comptes, du cabinet Flandres Comptabilité Conseil (Marcq-en-Baroeul), relève qu'« il est encore difficile à l’heure actuelle de mesurer le poids de ces dispositifs sur le résultat des pharmacies, car nous ne disposons pas encore du recul nécessaire pour chiffrer l’ensemble de ces coûts ». Cependant, souligne l’expert-comptable, une chose est certaine, davantage que le coût de ces fournitures, finalement peu significatif, c'est la baisse de la productivité liée au respect des gestes barrière qu'il faut redouter. « L’étalement de la clientèle dans l’espace de vente, où seul un nombre limité de patients peut être accueilli, tout comme un allongement du temps passé au comptoir, sans générer obligatoirement plus de ventes, sont deux facteurs qui impactent la productivité des équipes », remarque-t-il. Des coûts d’autant plus difficiles à mesurer qu’ils seront cachés.
(1) Ministère du Travail – Fiche sectorielle « Travail en pharmacie : quelles précautions prendre contre le COVID-19 » 5 mai 2020 https://travail-emploi.gouv.fr/IMG/pdf/covid19_pharmacie_v080520.pdf
(2) https://bit.ly/2X6e7Zp
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