Comment réagir face à un patient qui décide de s'engager dans un jeûne ? Tout dépend de son état de santé et du type de jeûne envisagé, explique le Dr Bruno Raynard, du service de nutrition de l'IGR, mais il existe une règle générale que souligne le spécialiste, également coordinateur du rapport du réseau National alimentation cancer recherche (NACRe) sur la question : « Il vaut mieux ouvrir la discussion plutôt que de la fermer, et éviter ce côté un peu paternaliste que peut avoir la médecine française. »
Concernant le jeûne visant la perte de poids, la Société française de nutrition n'a pas pris de position officielle sur le sujet. « Il ne faut surtout pas stigmatiser les patients qui souhaitent entamer un jeûne, mais le rôle du médecin reste de déconseiller cette pratique, nous explique-t-on. En dehors des périodes de sommeil, le jeûne est antiphysiologique et peut provoquer des cétoses, des carences et des troubles du comportement alimentaire. Il existe aussi des modalités de jeûne très irritantes pour le côlon. Tout cela pour zéro bénéfice démontré ».
Selon le rapport de l'INSERM, les risques d'anémie par carence en fer, d'inflammation et fibroses au niveau hépatique et de dégradation du capital osseux sont particulièrement marqués chez les femmes enceintes ou allaitantes, les enfants ou les adolescents, les personnes âgées et les sportifs.
En cancérologie : non recommandé, mais à accompagner
Selon le réseau NACRe, il est conseillé de ne pas pratiquer le jeûne ou un régime restrictif au cours de la prise en charge d’un cancer. Comme tout régime restrictif, le jeûne fait courir un risque d’aggravation de la dénutrition et de la sarcopénie, deux facteurs pronostiques péjoratifs reconnus. Cela étant dit, un patient souhaitant tout de même pratiquer le jeûne peut bénéficier d'une évaluation et d'une surveillance diététique et nutritionnelle.
« Le jeûne est à proscrire chez les personnes qui ont déjà perdu du poids avec une fonte musculaire (40 % des patients atteints de cancer). » Pour les autres, il faut fixer des objectifs clairs et des limites précises en termes de perte de poids et de masse musculaire. Une évaluation de la force par Hand Grip Test à chaque consultation (idéalement toutes les 2 semaines) est préconisée. Enfin, il est conseillé de procéder à une vérification de la fonction rénale et de l’apparition de carences par un bilan biologique mensuel (ionogramme sanguin, urée, créatinine, numération sanguine, plaquettes, taux de prothrombine, temps de céphaline activée, vitamines D, B9 et B1).
Chez le diabétique : extrême méfiance
« Nous ne recommandons et n’encourageons pas le jeûne thérapeutique et restons très prudents quant à d’autres formes de régime comme le régime cétogène par exemple quand il n’est pas strictement encadré », réagit pour sa part la Fédération française des diabétiques. Pour les diabétiques, les conséquences de la pratique du jeûne peuvent être nombreuses : hypoglycémie (au cours du jeûne), hyperglycémie (due à des apports excessifs lors de la rupture du jeûne ou à une réduction inadaptée du traitement), acidocétose (conséquence d'une carence en insuline, la glycémie étant élevée au début de la période de jeûne), déshydratation et thrombose (en cas de limitation de consommation de boissons).
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