Initialement limitée à l'acte médical, l'idée d'une télésanté incluant des télésoins réalisés par d'autres professionnels de santé émerge peu à peu et pourrait bouleverser le parcours de soins des patients dans sa globalité. En première ligne, les sujets âgés et vulnérables vivant à domicile pourraient bénéficier d'un accompagnement soutenu par les pharmaciens et les infirmiers grâce à cette technologie. L'intérêt est d'assurer un suivi continu et régulier, tout en s'affranchissant des déplacements chronophages pour les professionnels et pénibles pour les patients âgés.
Le triple atout du télésoin.
L'opportunité du télésoin pour les sujets âgés, isolés et souffrant de maladie chronique, a été évaluée dès le début des années 2000. L'une de ces études, menée au Canada, a mis en avant un triple bénéfice de l'intervention dématérialisée du professionnel de santé au domicile du patient. Premier avantage, l'amélioration de l'autogestion des patients ; autrement dit, le télésoin favoriserait la participation active des personnes dans la prise en charge de leur pathologie. Autre atout, le télésoin semble favoriser l'interprofessionnalité, en optimisant l'échange des données et en développant la culture de la collégialité lors de la prise de décision. Enfin, comme la télémédecine, l'objectif majeur du télésoin est d'optimiser les ressources sanitaires en fluidifiant chaque intervention.
L'expertise pharmaceutique s'invite chez les patients en perte d'autonomie.
Quel serait l'intérêt d'un télésoin réalisé par le pharmacien ? La profession a engagé une réflexion sur ce sujet. « Après avoir enteriné la convention sur la télémédecine avec les médecins, l'ouverture de ce moyen aux autres professionnels de santé a été évoquée. La pharmacie a été la deuxième profession de santé à ouvrir les négociations sur la télémédecine, en tant qu'accompagnant de la la téléconsultation dans un premier temps. Avec la LFSS 2019, on a ajouté une strate supplémentaire : la télésanté, qui permet aux professions de santé d'utiliser cette technologie numérique pour pratiquer des télésoins », rappelle Sophie Sergent, pharmacienne, présidente de la commission exercice coordonné et pharmacie clinique à la FSPF et membre de la société française de télémédecine. Évidemment, le télésoin pharmaceutique ne peut pas permettre la délivrance du médicament. En revanche, l'engagement de la pharmacie dans la lutte contre la iatrogénie et le renforcement du bon usage des médicaments s'étant largement affirmé au cours de la dernière décennie, les nouvelles missions telles que les entretiens pharmaceutiques ou les bilans partagés de médication pourraient être réalisées à distance. « Il ne faut pas confondre : la télésanté n'est pas une nouvelle mission ou un nouvel objectif ; c'est un moyen supplémentaire d'organiser les missions que nous faisons déjà », insiste Sophie Sergent en précisant que les accompagnements pharmaceutiques sont la cible principale du télésoin pharmaceutique. Les modalités pour la pratique du télésoin pharmaceutique restent d'ailleurs à définir. Le dossier, entre les mains de la HAS, (Haute Autorité de Santé) devrait être rendu public au printemps prochain. « La HAS a audité les représentants de la profession pour savoir comment nous voyons les choses : l'objectif est de préciser les contours de cet outil et les situations pouvant en bénéficier, en faisant attention à ne pas favoriser une ubérisation de la médecine et de la pharmacie. Par exemple, un patient qui n'a jamais vu le pharmacien ne pourra pas, au sens de la définition du télésoin, bénéficier de l'expertise pharmaceutique à distance. Nous avons également alerté la HAS sur l'importance que chaque confrère qui pratique le télésoin soit rattaché à une pharmacie physique, comme chaque pharmacien dans son exercice est rattaché à un établissement ».
Un nécessaire équilibre entretien physique/télésoin à trouver.
En santé, la multiplication des moyens pour assurer et coordonner une prise en charge de qualité est pertinente à condition de trouver un équilibre. Le piège serait de systématiser le télésoin au détriment des rendez-vous à l'officine. « La mobilité du patient est primordiale pour sa santé : il faut donc être vigilant à ne pas accroitre l'isolement et la perte d'autonomie en ne proposant que le télésoin ou la téléconsultation ; ces évolutions professionnelles doivent se faire dans un contexte de parcours du patient qui inclut le présentiel », prévient Sophie Sergent. Priver le patient des déplacements au cabinet médical, infirmier ou à l'officine, n'est pas une solution satisfaisante. La question se pose alors de la sélection des patients pouvant effectivement tirer des bénéfices du télésoin. Enfin, pour confirmer l'efficacité de l'intervention pharmaceutique auprès des patients chroniques, par télésoin ou non, il serait pertinent de confier au pharmacien la possibilité de réagir efficacement et rapidement en cas d'urgence ou d'alerte, comme par exemple l'adaptation des traitements.
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