FRANÇOIS HOLLANDE va devoir gérer avec habileté les conséquences politiques et diplomatiques des choix militaires qu’il a faits. S’il a obtenu d’emblée le soutien de l’opposition à sa riposte-éclair à l’avancée des intégristes vers Bamako, le consensus national autour de ses décisions courageuses commence à craquer. De l’extrême gauche à l’extrême droite, les critiques pleuvent. La sérénité apparente du gouvernement ne suffit guère à répondre aux diverses questions que l’opinion se pose.
Jusqu’à vendredi, le président s’est refusé à émettre la moindre critique sur la brutalité de l’assaut algérien contre le site gazier d’In Amenas, sur la langue de bois, proche du ridicule, des autorités algériennes, sur l’absence totale de transparence à Alger. Le prudence lui commandait de rester sur sa réserve. En pleine bataille, il n’aurait pas été subtil d’afficher un ressentiment qui aurait compliqué une relation Paris-Alger déjà embrouillée. Cependant, en sauvegardant ses relations avec Alger, M. Hollande peut avoir donné le sentiment qu’une victoire à In Amenas lui importe plus que le sort de nos concitoyens qui ont été pris en otage. En outre, les autres gouvernements concernés, notamment ceux du Royaume-Uni, du Japon et des États-Unis n’ont pas manqué d’exprimer leur surprise douloureuse : non seulement l’Algérie n’a pas informé ces gouvernements de ses intentions, mais elle a été incapable, pendant au moins deux longues journées, de leur fournir, fût-ce confidentiellement, des informations sur le nombre de morts, de blessés et d’otages toujours détenus. Barack Obama n’a pas hésité à envoyé un avion à In Amenas pour rapatrier les ressortissants américains libérés, preuve qu’il est possible, dans certaines circonstances, de forcer la main des Algériens. Ce que M. Hollande s’est bien gardé de faire
La deuxième question, celle de la solidarité européenne, a été posée avec vigueur par l’ancien ministre Pierre Lellouche qui n’a pas hésité à demander : « Où est l’Europe ? » et s’est indigné de ce que les soldats français, qui, a-t-il rappelé, ne sont pas des mercenaires, ne soient guère aidés par des soldats des autres pays de l’Union européenne sur le terrain quand un conflit éclate. Il s’en est pris particulièrement à l’Allemagne qu’il juge totalement indifférente à ses devoirs communautaires, sur le plan des accords financiers de l’UE et sur les questions militaires où elle est absente. M. Lellouche étant aujourd’hui dans l’opposition, il peut prononcer des propos provocateurs, ou même excessifs. Mais il sera imité par d’autres, ce qui risque de compliquer aussi une relation Paris-Berlin qui n’est pas au beau fixe depuis que M. Hollande est président.
Le parti de la neutralité.
La troisième question porte sur l’extension du terrorisme intégriste et les moyens de s’y opposer. Peu de personnalités politiques, à part les mouches du coche comme Dominique de Villepin, désapprouvent l’engagement spectaculaire de la France au Mali. Mais il existe une sorte de parti de la neutralité qui parcourent tout l’éventail politique et qui va se faire entendre, augmentant la pression sur le chef de l’État, qui devra se garder à l’extrême gauche et à l’extrême droite, en attendant les petits coups de Jarnac dont les Verts sont friands.
Enfin, M. Hollande ne peut avoir pris des risques si élevés que pour réussir. Non sans intelligence, le pouvoir limite sa communication, notamment en ce qui concerne la situation stratégique au Mali, d’où nous viennent des informations inexactes ou partielles. On veut espérer que les forces françaises ont un plan secret susceptible de les faire triompher de l’ennemi. Mais il est clair que la dissémination des terroristes sur tout le territoire malien va rendre leur tâche extrêmement difficile. Non seulement elles doivent éliminer les terroristes, mais elles doivent rendre le nord du Mali à la liberté, ce qui implique une forte présence militaire, sans doute africaine, mais surtout très vigilante.
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