Le Quotidien du pharmacien.- Pharmacien de PUI ou pharmacien de ville, quel est le choix du réseau Korian pour l'approvisionnement en médicaments de ses EHPAD ?
Dr Paul-Émile Haÿ.- Chez Korian, pour ce qui concerne notre réseau médico-social (EHPAD), le fonctionnement avec une PUI est très minoritaire. Nous avons en effet fait le choix, très pragmatique, de concentrer nos efforts sur ce que l'on sait faire. Aujourd'hui, la seule et dernière PUI qui existe est isolée parmi nos 300 EHPAD. Mais le fait que nous travaillions quasi exclusivement avec les officinaux de ville est historique, cela n'est pas le résultat d'une stratégie. Notre dialogue avec les officines de ville est excellent et on ne voit pas de raisons de modifier cela.
La préparation des doses à administrer (PDA), telle qu’elle est actuellement réalisée en ville par certains officinaux, est-elle une solution fonctionnelle et acceptable pour satisfaire l’approvisionnement des EHPAD en médicaments ?
Oui, absolument ! C'est même devenu notre standard de fonctionnement. Depuis déjà de longues années nous avons incité les pharmacies qui souhaitaient travailler avec nos établissements à s'équiper d'un système de PDA moderne et l'avons inscrit dans notre convention-type. En 2016, nous avons même réalisé une étude des typologies de PDA qui étaient utilisées sur notre réseau afin d'identifier les avantages et inconvénients de chaque système. Les retours étaient globalement bons, notamment par rapport à d'anciens systèmes de préparation à la main par une infirmière, très minoritaires aujourd'hui dans nos établissements, et par rapport également à quelques rares situations de « PDA à l'ancienne » où le pharmacien se déplaçait à l'EHPAD pour remplir des piluliers rigides à compartiments non scellés. Ces expériences ont servi à définir les termes de notre convention-type qui précise notamment que nous privilégions la PDA en conditionnements scellés. En effet, ce qui fait foi pour nous, c'est la garantie par la présence d'un film, d'un opercule ou d'un sachet inviolable que la préparation a bien été réalisée et sécurisée par un pharmacien. C'est cette procédure qui nous permet d'assurer la sécurité de la distribution et de promettre qu'il n'y aura pas un comprimé où une gélule qui se déplace d'un compartiment à un autre comme c'était possible avec les piluliers « ancienne version ».
Ces conditions de préparation font gagner en temps, en sécurité, en qualité et en confort pour tous. Un exemple : les chariots qui permettent de transport des médicaments préparés lorsqu'ils portent les systèmes rigides « ancienne version », sont très volumineux et très lourds à déplacer. Les systèmes de PDA plus modernes rendent l'opération à la fois plus sûre, mais aussi plus silencieuse et confortable pour tout le monde, employés comme résidents. Ces dix dernières années, le développement de la PDA scellée a vraiment permis d'améliorer la sécurité de la distribution du médicament dans nos établissements. Et ce gain de sécurité s'observe à tous les niveaux : à l'étape de la préparation à l'administration, mais aussi lorsqu'il s'agit d'assurer les conditions de bonne conservation.
Privilégiez-vous un profil d'équipement pour PDA ? Aidez-vous, d'une façon ou d'une autre, les pharmaciens à s'équiper ?
D'une certaine façon, oui, nous aidons les pharmaciens. Il y a un an, nous avons réalisé un inventaire des solutions techniques existantes dans le cadre de la révision de notre convention-type. Cela nous a permis d'établir un cahier des charges des spécifications du système de PDA qui nous semble le plus adapté à la sécurité, à la qualité et à la fonctionnalité de l'EHPAD. Mais pas seulement, car ce cahier des charges visait aussi à ne pas mettre en difficulté économique les pharmaciens. En clair, notre convention-type stipule que l'équipement du pharmacien avec un système de PDA ne le mette pas en péril financier. Par exemple, l'investissement dans un robot ne doit pas tenir sur un fragile équilibre tel l'approvisionnement d'un seul établissement en zone rurale… À leur demande, nous pouvons les guider en matière d'équipement et sur la pertinence de leur investissement. Notre expérience et notre recul en ce domaine nous permettent d'aider les officinaux dans le choix le plus adapté.
Quelle est la qualité de votre relation avec les pharmaciens signataires de votre convention d'approvisionnement ?
Je n'ai pas eu à ce jour connaissance de difficulté, pour un établissement, à trouver sa solution d'approvisionnement par PDA auprès des officinaux. Au travers de notre convention, les pharmacies s'investissent volontiers dans un engagement réciproque avec l'EHPAD, avec toujours le même objectif d'un service soucieux de qualité et de sécurité.
La place et le rôle du pharmacien dans les EHPAD pourraient-ils être, selon vous, améliorés ?
La nouvelle convention avec l'assurance-maladie pose les bases de ce nouveau rôle du pharmacien dans les EHPAD. Chez Korian, nous avons constaté, notamment avec l'étude DemAsCH (lire notre article du 23 janvier), que la place du pharmacien est à renforcer. Les officinaux sont au début d'un nouveau dialogue avec les prescripteurs. Ce dialogue, qui vise à discuter les prescriptions potentiellement inappropriées, n'est pas forcément très naturel au démarrage… Parce que la démarche est délicate. Mais ce qu'a montré l'étude, c'est que grâce à un outil extérieur et objectif, un indicateur de comparaison par rapport à d'autres établissements, on peut engager le dialogue avec le prescripteur en lui disant : « voilà pour information où se situe le score de notre établissement par rapport aux autres pour une prescription donnée. Discutons-en et trouvons ensemble de solutions alternatives. » Ce type de démarche s'apparente au principe même du bilan de médication tel qu'il est désormais pratiqué en ville par les pharmaciens. Je suis convaincu que c'est la bonne voie du dialogue interprofessionnel. Pour moi, les bases sont jetées. Le spécialiste du médicament qu'est le pharmacien a naturellement toute sa place dans le bon usage du médicament. À cet égard, notre intervention nous semble légitime. Ni prescripteur, ni pharmacien, nous sommes entre les deux et créons avec eux comme un triangle au bénéfice du bon usage du médicament. Preuve de cet engagement, le groupe Korian est d'ailleurs membre de l'association du bon usage du médicament.
Les pharmaciens peuvent-ils être prescripteurs d'EHPAD ?
Oui, je suis intimement convaincu que les pharmaciens, avant même d'être prescripteur d'EHPAD, sont des prescripteurs du parcours de soins. Le réseau officinal français est en effet particulièrement bien doté. Il est marqué à la fois par une forte présence territoriale et une obligation de service renforcée par la déontologie. Voilà pourquoi, les pharmaciens sont pour moi l'un des premiers recours pour les patients à la recherche d'une solution médicale. La pharmacie n'est plus seulement le lieu du médicament, elle est aussi désormais un lieu de soins. C'est l'une des raisons qui amènent Korian à entretenir ce lien avec le réseau officinal inscrit dans les territoires. Nous sommes convaincus que le pharmacien a toute légitimité pour nous recommander.
Article précédent
Quand le regard vieillit
Article suivant
Un habitat sur mesure
Les promesses raisonnables de l'électrostimulation
Questions d'âge
Ongles et cheveux en danger !
Quand le regard vieillit
« La PDA scellée, facteur de sécurité et de confort dans les EHPAD »
Un habitat sur mesure
Les 5 révolutions d’un corps qui vieillit
Sages ordonnances
L'homme (âgé) n'est pas l'égal de la femme (âgée)
Le télésoin, une solution pour les patients en perte d'autonomie ?
Bien accueillir les seniors à l'officine
Insolite
Épiler ou pas ?
La Pharmacie du Marché
Un comportement suspect
La Pharmacie du Marché
Le temps de la solidarité
Insolite
Rouge à lèvres d'occasion